jeudi 8 janvier 2015

Le Box-Office France 2014


208 millions de spectateurs dans les salles en 2014, il y a de quoi se réjouir, soit une hausse des entrées de près de 8% par rapport à 2013. Après une année noire, le cinéma français a redressé la barre, réalisant une part de marché de 44 %, faisant presque jeu égal avec le cinéma américain (47 %) qui voit ses entrées nettement reculer (-10%). 

Un phénomène qui s'explique principalement par les succès des comédies, à commencer par le carton de Qu'est-ce qu'on a fait au Bon Dieu ? et ses 12 millions de spectateurs, suivi par Supercondriaque de Dany Boon (5,2 millions d'entrées). Citons également la surprise Babysitting (2,3 millions), Les Trois Frères - Le Retour (2,3 millions), Fiston (1,9 million), Barbecue (1,6 million) et Sous les jupes des filles (1,4 million). S'il n'est pas à proprement parler une comédie, Samba du duo Tolédano-Nakache a su toucher un large public (plus de 3 millions d'entrées) de même que La Famille Bélier qui a déjà dépassé les 3 millions de spectateurs et qui, à la vue de son impressionnant bouche à oreille, pourrait devenir le 2ème plus gros succès de 2014. 

La famille Bélier, plus de 3 millions d'entrées (en cours d'exploitation)

Après un passage à vide, Luc Besson a retrouvé les faveurs du public grâce à Lucy (5,2 millions) et le cinéma d'animation tricolore a également connu une bonne année grâce aux succès d'Astérix - Le domaine des Dieux (près de 3 millions d'entrées) et de l'irrésistible Minuscule (1,5 millions).

Hippocrate de Thomas Lilti, l'un des succès français de l'année

Le cinéma d'auteur est moins à la fête. Parmi les 18 longs métrages français millionnaires, on ne compte que deux films dramatiques : le biopic Yves Saint Laurent (1,6 millions) et le polar La French (1,5 millions). Pour le reste, à l'exception notable du succès réjouissant d'Hippocrate (plus de 900 000 entrées) et des très bons scores enregistrés par Lulu femme nue (500 000 entrées) et Les Combattants (400 000), aucun film ne dépasse les 500 000 entrées. Malgré les louanges parfois excessives de la presse, Saint Laurent (355 000), Trois Coeurs (365 000), Sils Maria (230 000), L'Homme qu'on aimait trop (300 000) ou Dans la cour (350 000) n'ont pas séduit le public. Soit l'incarnation du "cinéma du milieu" énoncé il y a quelques années par Pascale Ferran qui a elle aussi subi un sérieux revers (150 000 entrées pour Bird People), ces oeuvres au budget confortable (entre 7 et 8 millions d'euros), au casting prestigieux (Catherine Deneuve, Juliette Binoche, Benoît Poelvoorde, Guillaume Canet...) et présentées dans les plus grands festivals (Cannes, Berlin, Venise). Sans parler des productions plus modestes qui ont connu des fours terribles (Métamorphoses, Eden, Tiens-toi droite...) et qui ne semblent devoir leur survie qu'à quelques journaux complaisants.

The Search de Michel Hazanavicius, un très lourd échec

Quelques accidents industriels ternissent également le tableau, à commencer par l'échec subi par The Search de Michel Hazanavicius (70 000 entrées pour 20 millions d'euros de budget), victime d'un sujet difficile (la guerre en Tchétchénie) et d'un scandaleux lynchage critique. Un illustre Inconnu de Matthieu Delaporte (110 000 entrées pour 13 millions de budget) devrait freiner l'envie des producteurs de monter un projet sur le nom de Mathieu Kassovitz après les bides successifs de L'ordre et la morale, La vie d'une autre, Le Guetteur et Vie Sauvage. Le navet Grace de Monaco a aussi bu la tasse (300 000 entrées pour 25 millions de budget), de même que le thriller Colt.45 qui a souffert d'une production chaotique (65 000 entrées pour 13 millions de budget), Le dernier diamant (135 000 entrées pour plus de 11 millions de budget), Jacky au royaume des filles (120 000 entrées pour 11 millions de budget) et Benoît Brisefer (120 000 entrées pour 11 millions de budget). 

Les Gardiens de la Galaxie, l'une des surprises de l'année au box-office 

Le cinéma yankee subit lui une chute de sa fréquentation mais maintient plutôt bien ses franchises, à commencer par Le Hobbit : La bataille des Cinq Armées qui devrait terminer sa carrière à 5 millions d'entrées, La Planète des Singes : l'Affrontement (3,8 millions), X-Men : Days of Future Past (3,3 millions) et Hunger Games - La Révolte : Partie 1 (3,2 millions). Et parmi les nouvelles franchises qui n'étaient pas particulièrement attendues, Les Gardiens de la galaxie (2,4 millions) et Le Labyrinthe (3,1 millions) ont réalisé de jolis scores. 

Gone Girl, l'un des plus beaux succès de David Fincher

Les grands cinéastes américains se portent bien auprès des spectateurs, que ce soit David Fincher qui a connu grâce à Gone Girl l'un de ses plus beaux succès (1,9 million), l'inusable Woody Allen (1 million d'entrées pour Magic in the Moonlight, son vingtième film millionnaire !) ou de manière plus relative Christopher Nolan avec Interstellar (2,6 millions). Seul Clint Eastwood a encaissé un revers cinglant, Jersey Boys étant l'un des grands flops de sa carrière (à peine 200 000 entrées). Dans la plus jeune génération, citons les plus gros succès en France de Wes Anderson avec The Grand Budapest Hotel (1,5 millions) et Steve MacQueen et son oscarisé 12 Years a Slave (1,7 millions). 

Plus d'un million d'entrées pour Mommy de Xavier Dolan

Enfin, terminons ce tour d'horizon avec le reste du monde qui voit sa part de marché (à peine 10%) se réduire dangereusement. Mais réjouissons-nous de l'accueil chaleureux et enthousiaste réservé à Mommy de Xavier Dolan qui a totalisé plus d'un million de spectateurs, le miraculeux Ida de Pawel Pawlikowski et ses 500 000 entrées, Timbuktu d'Abderrahmane Sissako qui devrait atteindre les 700 00 entrées en fin de carrière, Winter Sleep qui, malgré sa durée, a su capter 350 000 spectateurs et le documentaire Le Sel de la Terre de Wim Wenders, consacré au photographe Sebastiao Salgado, qui a réuni plus de 300 000 spectateurs. Un coup de chapeau à leurs distributeurs, Memento Films (voir l'interview de Frank Salaün) et Le Pacte, pour avoir su attiser la curiosité d'un public lassé des productions formatées. 

Antoine Jullien

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