mardi 30 septembre 2014

La fondation Jérôme Seydoux-Pathé

 
Depuis le 10 septembre, le public peut découvrir, dans le 13ème arrondissement de Paris, la fondation Jérôme Seydoux-Pathé. Situé à la place de l'ancien théâtre des Gobelins, ce nouveau lieu a conservé sa magnifique façade sculptée par Auguste Rodin. Conçu par l'architecte italien Renzo Piano, le bâtiment, d'une superficie de 2 200 m2, a été imaginé comme une coque de cinq étages, et a pour vocation de faire partager au public l'étendue du catalogue Pathé et de son patrimoine.

Le jardin de la Fondation

Au premier étage, on peut admirer un ensemble d'appareils cinématographiques, de caméras et de projecteurs commercialisés par Pathé depuis 1897 jusqu'aux années 80, et visionner ainsi les films familiaux tournés par Charles Pathé. Pour mieux comprendre l'utilisation de ces appareils, des tablettes numériques à disposition des visiteurs permettent d'en découvrir le mécanisme. 

La salle des appareils cinématographiques

La Fondation possède également les archives de la société Pathé et de plus de 80 sociétés liées au groupe (documents administratifs, scénarii, dossiers de presse...), une collection de 5000 affiches ainsi que des photographies de plateau et de tournage réalisées depuis 1897. Tous ces documents sont avant tout destinés aux chercheurs, aux professionnels et aux étudiants, consultables sur rendez-vous au centre de recherche et de documentation, et ne sont pas directement accessibles au public. 

Le centre de recherche et de documentation

En revanche, une salle de cinéma, située au sous-sol, permettra aux spectateurs de découvrir des films souvent oubliés de l'histoire du cinéma, principalement issus de la période du muet, à travers des cycles et des rétrospectives. 

Un lieu à visiter, de par son étonnante architecture faite de bois et d'acier et par la richesse du patrimoine qu'il renferme, même si l'on regrette que l'espace d'exposition ne soit, pour l'heure, pas plus conséquent. 

Fondation Jérôme Seydoux-Pathé 
73 avenue des Gobelins - 75013 Paris 
Informations : http://fondation-jeromeseydoux-pathe.com/ 

jeudi 25 septembre 2014

Elle l'adore


On aime les bonnes surprises au cinéma et Elle l'adore en fait assurément parti. Ce premier long métrage de Jeanne Herry, connue pour être la fille de Julien Clerc et Miou-Miou, surprend, intrigue, étonne. Dans le paysage si prévisible de notre cinéma hexagonal, voir une réalisatrice manier les genres avec brio fait souffler un air frais pas désagréable sur un sujet pourtant traité mille fois, le fan, et son rapport névrotique avec son idole. 

Sauf que la fan en question est jouée par Sandrine Kiberlain, la première bizarrerie de film. A rebours des clichés que sous-attend un tel personnage, l'actrice parvient à lui insuffler un comique imprévisible et décalé. Car cette femme, ordinaire en apparence, va se révéler être une mythomane accomplie qui aime inventer des histoires, de plus en plus rocambolesques à mesure que le récit progresse. Le point d'orgue est une séquence jouissive et hilarante d'interrogatoire où, face à deux policiers soupçonneux, elle va ériger le mensonge vers une forme d'art suprême, lui permettant de se sortir de cette situation périlleuse. Et elle le fait avec une telle sincérité que son idole va également se laisser prendre au piège.

Sandrine Kiberlain

L'idole, c'est Laurent Laffite (très sobre), un chanteur de variétés plutôt propre sur lui qui tue accidentellement sa femme suite à une violente dispute. Pour se sortir de ce très mauvais pas, il demande à sa plus grande fan de l'aider, échafaudant un stratagème qui lui permettrait d'échapper à la police. Elle accepte mais ne doit lui poser aucune question et opérer le plan scrupuleusement. Sauf que sa mythomanie galoppante va tout faire basculer.

Grâce à un scénario très habile, construit comme un mille-feuille, Jeanne Herry nous manipule pour notre plus grand plaisir. La première partie, admirablement bien construite, nous fait, peu à peu, savamment découvrir la névrose de Sandrine Kiberlain. La cinéaste porte un regard original sur son admiratrice, traitant du mensonge et de son vertige dans un mélange de cocasserie et de noirceur captivant. Et l'ironie n'est pas loin, lorsque la vérité du personnage depuis plus invraisemblable que ses histoires à dormir debout. 

La réalisatrice n'hésite pas non plus à faire confiance aux personnages secondaires afin d'enrichir son intrigue, à commencer par ce savoureux duo de flics campé par Pascal Demolon et Olivia Côté, couple adultère dépassé par leur enquête. Dans les dernières séquences, le film prend une tournure différente, explorant le sentiment de prise de pouvoir que l'on peut exercer sur l'autre. Alors éloigné de la comédie policière auquel on l'a parfois réduit, Elle l'adore finit par provoquer un léger trouble.

Antoine Jullien

France - 1h45
Réalisation : Jeanne Herry - Scénario : Jeanne Herry et Gaëlle Macé

Avec : Sandrine Kiberlain (Muriel Bayen), Laurent Lafitte (Vincent Lacroix), Pascal Demolon (Antoine), Olivia Côte (Coline). 



Disponible en DVD et Blu-Ray chez Studio Canal. 

dimanche 21 septembre 2014

Mon Cinématographe au Festival de Deauville



Mon Cinématographe était au Festival du cinéma américain de Deauville, qui fêtait cette année son quarantième anniversaire, et vous propose un large panorama de la manifestation. 

Vous retrouverez en interview deux des personnalités honorées cette année et à qui le festival à rendu hommage. D'abord l'acteur comique Will Ferrell, connu pour ses prestations hilarantes dans Légendes Vivantes ou Ricky Boby - Roi du Circuit, qui nous a gratifié d'un français tout à fait personnel. Puis le comédien Ray Liotta, inoubliable depuis Les Affranchis de Martin Scorsese, et à l'affiche de nombreux polars et autres films de gangsters, qui nous a expliqué sa vision du métier d'acteur.


Le festival proposait également une compétition de quatorze long métrages indépendants, de qualité diverse, dont le grand vainqueur est le formidable Whiplash de Damien Chazelle, auréolé du Grand Prix et du prix du public, et qui a obtenu une standing ovation de quinze minutes !  Mon Cinématographe l'avait découvert lors du dernier festival de Cannes et l'a depuis évoqué à plusieurs reprises. Vous pourrez d'ailleurs découvrir très bientôt une version longue de l'interview que nous avait accordé Damien Chazelle et J. K. Simmons lors du festival de Cannes.


Nous avons retenu deux films de la compétition. Le premier est le nouveau long métrage de Gregg Araki, White Bird, qui nous plonge dans l'Amérique de la fin des années 80 à travers une portrait désenchanté de l'american way of life. Loin de ses excentricités coutumières, Araki nous bouleverse en dépeignant l'incompréhension et l'indifférence d'une fille pour sa mère qui, après sa mystérieuse disparition, va peu à peu la hanter. Onirique, secrètement mélancolique, White Bird est sans conteste l'un des films les plus touchants du cinéaste, et aussi l'un des plus surprenants, avec un coup de théâtre stupéfiant, applaudi par toute la salle. Ne manquez pas cette belle proposition de cinéma, à découvrir en salles à partir du 15 octobre.

Le second film que nous avons retenu est le deuxième long métrage de Mike Cahill, I Origins, qui s'était fait connaître il y a trois ans avec Another Earth. Cette fois, il nous propose une réflexion sur la science et la spiritualité en racontant une histoire d'amour liée au pouvoir des yeux. Bancal, parfois maladroit dans son traitement, Mike Cahill a tout de même le mérite d'aborder une sujet rarement traité dans le cinéma contemporain. Nous l'avons rencontré afin qu'il évoque avec nous les origines de son film.


Le festival proposait également des avant-premières, parmi lesquelles le dernier thriller de Roger Donaldson, un vieux routier du genre, qui signe The November Man dont la vedette est 007, alias Pierce Brosnan, qui a fait le voyage à Deauville pour l'occasion. L'acteur en a profité pour nous parler de ce thriller convenu mais efficace et revenir également sur son expérience des James Bond, accompagné de l'actrice ukrainnienne Olga Kurylenko.



Enfin, le star la plus attendue du festival, et qui a fait grimper l'applaudimètre, n'était autre que Mick Jagger, venu présenter un biopic très réussi sur James Brown, Get On Up, réalisé par Tate Taylor. Bien que le film demeure formellement conventionnel, il évite la plupart des pièges inhérents au genre et finit par nous électriser grâce à la personnalité et à la musique explosive du roi de la soul. A invité exceptionnel, mesures exceptionnelles, le CID de Deauville était bouclé pour la conférence de presse très attendue de l'équipe du film, à laquelle nous avons pu assister. Une dernière note stimulante pour un festival qui a, dans l'ensemble, tenu ses promesses.

dimanche 7 septembre 2014

Les films de la rentrée

ENEMY / PARTY GIRL / HIPPOCRATE


Le réalisateur québécois Denis Villeneuve a décidément la côte, enchaînant deux longs métrages coup sur coup... et qui ne sont pas sortis dans le bon ordre. L'excellent Prisoners a en effet été tourné après Enemy, mais pour des raisons logistiques propres aux studios, il est sorti dans les salles en premier. A part Jake Gyllenhaal, les deux films semblent ne pas avoir grand chose en commun... et pourtant. Avec cette histoire d'un homme qui rencontre son double, Denis Villeneuve poursuit son exploration des zones grises de l'âme humaine avec le même pouvoir d'attraction. 

Jake Gyllenhaal est à la fois Adam et Anthony. L'un est un professeur de lettres réservé, l'autre est un acteur de seconde zone qui attend son premier enfant. Dès la séquence inaugurale, l'effroi nous gagne. Non seulement à cause de ce qu'elle dévoile mais surtout de ce qu'elle laisse présager. La mise en scène de Denis Villeneuve va décupler cette angoisse souterraine grâce à sa pleine maîtrise de la caméra qui filme Toronto comme une ville fantôme (le film est sans doute la pire carte postale que pouvait craindre l'office de tourisme de la ville), enveloppée d'une lumière sépia qui dévitalise toute humanité. Les influences de Villeneuve sont à chercher du côté de Cronenberg pour les apparitions monstrueuses et à Lynch pour cette atmosphère si particulière renforcée par une utilisation magistrale du son et de la musique. 

Jake Gyllenhaal

Lorsque les deux hommes se voient pour la première fois, on est soudain pris d'un vertige. Rien ne les distingue mais le talent de Jake Gyllenhaal parvient à nous les rendre identifiables. Un jeu dangereux s'amorce alors, le film devenant une quête identitaire de plus en plus schizophrène. Le spectateur est désarçonné et se met à douter de ce qu'il voit à l'écran, déstabilisé par les réactions parfois surprenantes des protagonistes. Au générique de fin, on se met à échafauder différentes théories, essayant de déjouer les fils d'une énigme obsédante. L'une d'entre elles est séduisante (à vous de la trouver !) et apporte une autre dimension à cet Enemy, cauchemar arachnéen qui vous fera passer des nuits agitées. 

Canada / Espagne - 1h30
Réalisation : Denis Villeneuve - Scénario : Javier Gullon d'après la nouvelle de José Saramago 
Avec : Jake Gyllenhaal (Adam / Anthony), Mélanie Laurent (Mary), Sarah Gadon (Helen), Isabella Rossellini (La mère). 







Party Girl, premier long métrage de Marie Amachoukeli, Claire Burger et Samuel Theis, a décroché la prestigieuse Caméra d'or lors du festival de Cannes. S'inspirant de la vie de son personnage principal, le film oscille entre fiction et documentaire pour dresser le portrait sensible d'une femme plus toute jeune qui, après avoir été entraîneuse de cabaret à la frontière franco-allemande, décide de se ranger en épousant un habitué du lieu. Une autre vie commence pour Angélique, entourée de ses quatre enfants. Mais le désir de séduire et le besoin de faire la fête vont finir par contrarier ses nouvelles résolutions. 

Angélique Litzenburger

Angélique Litzenburger, la mère de Samuel Theis, existe bien mais elle est devenue, grâce aux trois cinéastes, un personnage de cinéma, haut en couleurs, d'une énergie folle, une bourrasque qui va causer quelques dégâts sur sa route. Car si elle se persuade de devenir (enfin !) raisonnable, à soixante ans passés, la raison ne tiendra pas longtemps face à son caractère entier. Tour à tour attendrissante et égoïste, enjouée et cruelle, elle est la clef de voûte de l'histoire et l'intérêt essentiel qu'on peut lui porter. Car les trois apprentis réalisateurs se retrouvent bien vite sur les terres balisées du cinéma-vérité, sans apporter d'angle nouveau à ce genre rebattu. Le début fait même craindre le pire tant on a la désagréable impression de se retrouver devant un mauvais épisode de l'émission Striptease, une ode complaisante au misérabilisme. La suite sera nettement meilleure, grâce notamment à une réalité sociale très incarnée, mais le concept même du film trouve ses limites, à coup d'improvisations et de mélange fiction / réel. Les enfants d'Angélique sont "joués" par ses propres filles et fils mais les personnages périphériques sont interprétés par des acteurs non professionnels. Le fait de rejouer une vie de cinéma décalquée sur le véritable vécu des protagonistes a quelque chose de séduisant mais aussi d'un peu vain. Party Girl est dans ce partage des eaux mais reste sublimé par le regard d'Angélique, définitivement ineffaçable. 

France - 1h35
Réalisation et Scénario : Marie Amachoukeli, Claire Burger et Samuel Theis sur une idée de Samuel Theis. 
Avec : Angélique Litzenburger (Angélique), Joseph Bour (Joseph), Mario Theis (Mario), Samuel Theis (Samuel). 




Hippocrate est le deuxième long métrage réalisé par Thomas Lilti qui s'est inspiré de son expérience personnelle de soignant afin de filmer l'itinéraire de deux internes en médecine. Le jeune réalisateur a le mérite de sonder un milieu professionnel, l'hôpital public, ce que le cinéma français n'ose pas assez. Connaissant parfaitement l'activité médicale, il a réussi à allier ce souci documentaire aux besoins de la fiction. Et le résultat, très réaliste, est une complète réussite. 

Reda Kateb et Jacques Gamblin

Ne sortant presque jamais des murs de l'hôpital, Thomas Lilti nous en fait découvrir les moindres recoins, des chambres des malades au réfectoire des internes en passant par les sous-sols, c'est une ruche hétéroclite qui palpite sous l'oeil aiguisé de sa caméra. Son sens de l'observation fait mouche et sa direction d'acteurs également, où brille Vincent Lacoste, révélé dans Les Beaux Gosses, qui trouve ici son premier rôle adulte, et Reda Kateb (Un Prophète, Gare du nord) qui confirme de film en film son charisme tranquille. Ils vont devenir les acteurs mais aussi les victimes d'une institution vacillante où le manque de moyens le dispute aux guerres de services. Thomas Lilti n'oublie donc pas de dénoncer les dysfonctionnements de l'hôpital, ces prises de décision parfois hâtives aux conséquences graves mais rend également un vibrant témoignage au travail du personnel hospitalier dont l'abnégation et le sens des responsabilités balayent les idées préconçues. 

Il parvient enfin à nous faire vivre cet environnement en alternant les plages d'humour, filmant des moments de rigolade entre internes, à la confrontation avec les familles puis l'accompagnement des malades en fin de vie. Poignant par endroits, cocasse dans d'autres, Hippocrate est à la hauteur de son serment et nourrira peut-être, malgré les difficultés montrées, de futures vocations. Un bien d'utilité publique.

Antoine Jullien 

France - 1h42
Réalisation : Thomas Lilti - Scénario : Thomas Lilti, Julien Lilti, Baya Kasmi et Pierre Chausson
Avec : Vincent Lacoste (Benjamin), Reda Kateb (Abdel), Jacques Gamblin (Le professeur Barois), Marianne Denicourt (Dr. Denormandy). 

vendredi 5 septembre 2014

Le 40ème festival du cinéma américain de Deauville


Le festival du cinéma américain de Deauville fête cette année son quarantième anniversaire et a pour l'occasion dévoilé un programme de choix. 

Le jury présidé par Costa Gavras devra départager seize longs métrages figurant en compétition dont plusieurs découverts à Sundance et à Cannes : le formidable Whiplash de Damien Chazelle qu'on a déjà évoqué à plusieurs reprises (retrouvez l'interview du réalisateur ICI), Cold in July de Jim Mickle, White Bird de Gregg Arakki (sortie le 15 octobre) ou encore Un homme très recherché, une adaptation d'un roman de John Le Carré par Anton Corbijn (sortie le 17 septembre). 

Magic in the Moonlight de Woody Allen

De nombreuses avant-premières seront proposées au public, parmi lesquelles Magic in the moonlight, le nouveau Woody Allen (sortie le 22 octobre) qui fait l'ouverture de la manifestation, Pasolini d'Abel Ferrara, un biopic du célèbre intellectuel italien interprété par Willem Dafoe, Avant d'aller dormir avec Nicole Kidman (sortie le 24 septembre) et un documentaire en 3D raconté par James Cameron, Deepsea Challenge 3D, sur l'exploration des fonds marins (sortie le 17 septembre). 

Le festival fait d'ailleurs la part belle aux documentaires à travers une belle sélection "Les docs de l'Oncle Sam", consacre une rétrospective aux films primés durant les précédentes éditions et met en perspective les nouvelles séries Tv avec cette année The Strain produite par Guillermo Del Toro. 

John McTiernan

Plusieurs personnalités seront mis à l'honneur et viendront fouler les planches du festival pour des hommages qui leurs seront rendus : la talentueuse Jessica Chastain, John McTiernan, le réalisateur d'A la poursuite d'Octobre Rouge et Die Hard, les acteurs Ray Liotta et Will Ferrrel sans oublier le producteur Brian Grazer. 

Enfin, le festival a voulu se souvenir de Robin Williams et Lauren Bacall, récemment disparus, à travers une sélection de leurs films les plus célèbres. 

Mon Cinématographe couvre l'évènement, on vous en reparle la semaine prochaine ! 

40ème festival du cinéma américain de Deauville du 5 au 14 septembre