mercredi 30 septembre 2015

Le Petit Cinématographe à la Fondation Pathé

 
A partir d'aujourd'hui, la fondation Jérôme Seydoux-Pathé propose aux jeunes spectateurs et à leurs parents un programme hebdomadaire intitulé Le Petit Cinématographe

Il s'agit d'un Ciné-Spectacle de 2h comprenant d'abord une présentation scénarisée de la Lanterne Magique (l'ancêtre du cinématographe), puis la projection de petits films muets réalisés aux tous premiers temps du cinéma, accompagnée par un pianiste.


La séance se poursuivera par une initiation à l'accompagnement musical puis par la visite commentée de la galerie des appareils qui présente l'évolution des caméras et projecteurs Pathé depuis 1896. 

Inaugurée il y a un an (voir l'article), la fondation Jérôme Seydoux-Pathé projette quotidiennement des films muets accompagnés au piano. Un concept ludique qui permet au public de revivre les premières heures du cinématographe. 


Le Petit Cinématographe à la Fondation Jérôme Seydoux-Pathé, 73 avenue des Gobelins - 75013 Paris
Chaque mercredi à 14h30 à partir du 30 septembre
Renseignements : www.fondationjeromeseydoux-pathe.com

mardi 29 septembre 2015

Keanu Reeves présente Knock Knock au festival de Deauville


Keanu Reeves fut l'une des rares stars d'envergure a être venu fouler les planches deauvillaises lors du 41ème festival du Cinéma Américain. Après son passage remarqué l'an dernier au Champs-Elysées Film Festival où il avait dévoilé un passionnant documentaire, Side By Side, sur le passage de l'argentique au numérique, il était accompagné cette fois de l'équipe du film Knock Knock (en salles depuis le 23 septembre), un thriller cruel et sexy réalisé par Eli Roth à qui l'on doit Hostel et Cabin Fever.

Dans la peau d'un bon père de famille en apparence qui voit débarquer chez lui deux superbes jeunes femmes prêtes à tout pour le séduire, l'acteur fait le job, sans beaucoup de conviction. Ses partenaires, Lorenza Izzo et Anna De Armas, font en revanche des étincelles et pimentent un film plutôt amusant dans sa première partie mais qui finit par s'essouffler. Comme à son habitude, Eli Roth se contente de reprendre sagement les codes du genre sans les bousculer ni les subvertir.

Lorenza Izzo

Nous avons rencontré l'acteur et le réalisateur lors de la conférence de presse du film et interviewé la jeune comédienne chilo-américaine Lorenza Izzo, épouse à la ville d'Eli Roth, qui est aussi l'interprète principale du précédent long métrage du réalisateur, The Green Inferno, sorte d'hommage sans grande aspérité au fameux Cannibal Holocaust. Le film sortira directement en E-Cinéma le 16 octobre. 

Antoine Jullien

Etats-Unis / Chili - 1h35
Réalisation : Eli Roth - Scénario : Eli Roth, Nicolas Lopez et Guillermo Amoedo
Avec : Keanu Reeves ((Evan), Lorenza Izzo (Genesis), Ana De Armas (Bel), Aaron Burns (Louis).  


samedi 26 septembre 2015

Ian McKellen et Orlando Bloom au festival de Deauville

 
Lors du 41ème festival du Cinéma Américain de Deauville, Mon Cinématographe est allé à la rencontre des deux stars du Seigneur des Anneaux, Ian McKellen et Orlando Bloom, qui ont été également les vedettes de sagas aussi populaires que X-Men ou Pirates des Caraïbes

Un hommage précoce a été rendu à l'interprète de Légolas qui a déclamé tout son amour pour le cinéma français et les réalisateurs tricolores. Il demande d'ailleurs expressément à Jacques Audiard de le prendre pour son prochain film, tourné en anglais.


Ian McKellen, alias Gandalf, était aussi mis à l'honneur pour sa prestigieuse carrière. Il a profité du festival pour présenter son nouveau film, Mr. Holmes (sortie le 27 avril 2016), un portrait intime et touchant du célèbre personnage, ici vieillissant, créé par Arthur Conan Doyle. 

Antoine Jullien


jeudi 24 septembre 2015

Everest

 
12 à 14 heures de tournage par -30°pendant six semaines, certaines séquences mises en boîte à 4 870 mètres d'altitude... Autant dire que l'équipe du film Everest a (beaucoup) souffert pour proposer au public une aventure immersive et inédite. Le réalisateur islandais Baltasar Kormákur (Jar City, 2 Guns) précise même que "l'eau était gelée et on n'avait pas de chauffage dans nos hébergements. On dormait dans des couvertures chauffantes. On pouvait à peine se lever du lit pour aller pisser tellement il faisait froid." Une entreprise éprouvante à la hauteur de celle, tragique, vécue par un groupe d'alpinistes dans les montagnes de l'Himalaya.

Le film suit deux expéditions confrontées aux plus violentes tempêtes de neige que l'homme ait connues. Combattant contre l'extrême sévérité des éléments, ils vont devoir faire preuve d'un immense courage afin de lutter contre des obstacles de plus en plus insurmontables. Certains n'en reviendront pas. 

Jason Clarke

L'histoire, véridique, s'est déroulée en 1996. Hollywood raffole de ce genre de récit et a jeté son dévolu sur le livre de John Krakauer, Tragédie à l'Everest, qui relate cette expédition désastreuse dans laquelle huit alpinistes réputés ont péri dans une redoutable tempête. Témoin des évènements, l'écrivain et journaliste dénonçait les effets néfastes de la commercialisation outrancière autour de l'ascension de l'Everest. Un propos fortement atténué par Baltasar Kormákur qui a préféré privilégier la dimension humaine de cette histoire. Pour l'incarner, il a convoqué un casting prestigieux, entraîné rigoureusement aux effets de la haute altitude, et utilisé la 3D à bon escient afin de faire ressentir efficacement au spectateur la peur et la danger.

Après une première heure sans grand intérêt qui se contente de passer en revue les principaux personnages, la tempête survient et le spectacle est au rendez-vous. Le travail sur le son et la 3D accentue le réalisme de la mise en scène, faisant monter le suspense crescendo. Mais le réalisateur est lesté d'un scénario convenu, alternant maladroitement la débâcle de l'expédition aux moments larmoyants où les épouses éplorées des alpinistes (Kera Knightley et Robin Wright, réduites aux utilités) sanglotent au téléphone. L'ensemble est d'ailleurs dépourvu de toute personnalité, respectant scrupuleusement le cahier des charges du film catastrophe. A l'exception de Jason Clarke, la distribution semble curieusement effacée, certains acteurs étant purement sacrifiés (quid du pauvre Jake Gyllenhaal ?). Se concluant par un hommage appuyé aux alpinistes disparus, Everest ne marquera pas nos rétines, trop classique dans sa forme et lisse dans ses intentions. 

Antoine Jullien

Grande-Bretagne / Etats-Unis / Islande - 2h
Réalisation : Baltasar Kormákur - Scénario : William Nicholson et Simon Beaufoy
Avec : Jason Clarke (Rob Hall), Josh Brolin (Beck Weathers), John Hawkes (Doug Hansen), Michael Kelly (John Krakauer), Jake Gyllenhaal (Scott Fisher).

Disponible en DVD et Blu-Ray chez Universal

lundi 21 septembre 2015

Agents très spéciaux - Code U.N.C.L.E.


Après s’être encanaillé avec "Iron" Downey Jr. sur les deux premiers volets de la saga Sherlock Holmes, le réalisateur britannique Guy Ritchie remplace au pied levé Steven Soderbergh pour lancer la franchise The Man from U.N.C.L.E. (le titre américain) adaptée de la série éponyme diffusée dans les années 60 avec Robert Vaughn et David McCallum. 

Agents Très Spéciaux évoque la rencontre entre l’espion américain Napoleon Solo (Henry « Man of steel » Cavill) et son homologue russe Illya Kuryakin (Armie Hammer) qui doivent collaborer, malgré leur opposition naturelle (Guerre Froide oblige), pour déjouer les plans d’une organisation criminelle en passe d’obtenir l’arme nucléaire. Leur mission nécessite l'aide de la jeune allemande Gaby Keller (Alicia Vikander) dont le père est en train de confectionner, sous la menace de ses ravisseurs, quelques petits pétards atomiques.  

Armie Hammer et Henry Cavill

À la croisée du buddy movie et du film d’espionnage, le nouveau film de Guy Ritchie ne s’emballe jamais véritablement. Le scénario épouse une trame simpliste qui ne surprend à aucun moment un spectateur rodé à ce genre d’exercice. Cela ne serait pas très grave si la cohabitation annoncée comme tumultueuse entre les deux espions s’avérait payante. Mais là encore, le bât blesse.

Malgré l'évidente complicité entre Cavill et Hammer, leurs personnages respectifs se ressemblent beaucoup trop pour pimenter une relation que l’ont souhaitait explosive. Alors que l’on s’attendait à voir une version remastérisée du couple Brett Sinclair/Danny Wilde de la série Amicalement Vôtre où l’un venait compenser les faiblesses de l’autre à coup d’humour dévastateur, on se retrouve ici plutôt embarqué dans les aventures des Dupont et Dupond version Hergé. Bien évidemment, l’espion américain est décontracté et charmeur tandis que le russe est impulsif et dévastateur, mais c’est bien tout ce qui les sépare. Pour le reste, ce sont des maestros de l’espionnage, tellement efficaces qu’ils en deviennent ennuyants.

Henry Cavill et Alicia Vikander

Certaines séquences restent heureusement énergiques et assez drôles mais on est très loin du niveau affiché par Guy Ritchie qui nous avait habitué, dans ses premiers films, à tricoter des histoires complètement farfelues truffées de personnages en décalage avec les stéréotypes habituels. Son audace semble s’être violemment émoussée après quatre longues années passées loin des plateaux de cinéma et ce n’est pas les quelques splits-screen disséminés dans un montage ronflant qui viennent dynamiser un film tout juste divertissant.

Avec des résultats plus que mitigés au box-office mondial (à peine 100 millions de dollars de recettes pour 75 investis, hors marketing), on est très loin d’imaginer une suite à ces Agents Très Spéciaux qui n’auront, en fin de compte, même pas entamé le monopole des franchises Mission : Impossible, James Bond et Jason Bourne (contrairement au sympathique Kingsman). On espère revoir un jour tout le talent de Guy Ritchie dans un film original mené tambour battant mais avec la sortie l’année prochaine d’une nouvelle franchise basée sur le roi Arthur (King Arthur) puis un retour à la saga Sherlock Holmes, on peut être sceptique quant à l’envie du réalisateur britannique de revenir à ses fondamentaux. Et c’est bien dommage...

Alexandre Robinne

Etats-Unis / Grande-Bretagne - 1h56
Réalisation : Guy Ritchie - Scénario : Guy Ritchie, Lionel Wigram, Jeff Kleeman, David C. Wilson d'après la série télévisée de Sam Wolfe
Avec : Henry Cavill (Solo), Armie Hammer (Illya), Alicia Vikander (Gaby), Elizabeh Debicki (Victoria), Hugh Grant (Waverly).  

Disponible en DVD et Blu-Ray chez Warner Home Vidéo

samedi 19 septembre 2015

Youth

 
Paolo Sorrentino n'est décidément pas dans les petits papiers des jurys cannois. Inexplicablement reparti bredouille avec sa Grande Bellezza, le voici à nouveau gros-jean comme devant, son dernier opus, Youth, n'ayant pas obtenu les faveurs des jurés du dernier festival de Cannes. Le cinéaste divise, en irritent certains, en charment d'autres. Son talent formel n'est pourtant plus à démontrer, faisant preuve une fois encore d'une incontestable maestria. Mais les palaces dorés des montagnes suisses semblent moins inspirer le réalisateur que les joyaux romains, et ne créé pas le bijou espéré. 

Deux vieux amis approchant l'heure du crépuscule profitent de leur vacances dans un bel hôtel au pied des Alpes. L'un deux, Fred (Michael Caine), est un éminent compositeur britannique qui n'a aucune intention de reprendre la baguette, même si la Reine le lui demandait. Mick (Harvey Keitel), réalisateur, lui travaille toujours, s'empressant de trouver une fin à son prochain film. 

Michael Caine et Harvey Keitel

Sorrentino a une science de l'espace qu'il maîtrise à merveille. Il parvient à transformer un lieu d'apparence froid et terne en un décor étrange et extravagant. Ses angles de caméra qui distordent les pensionnaires de l'établissement contribuent aussi à l'incongruité du film. Le spectateur est plongé dans un monde parallèle où l'on croise un Dalaï Lama en lévitation, un sosie de Diego Maradona qui peut à peine marcher ou une Miss Univers aux formes sépulcrales, regardés à travers les yeux de deux vieux messieurs qu'une indéfectible amitié lie depuis des années. Spectateurs d'une communauté zigzagante, ils cherchent à trouver un sens à leur dérisoire existence compensée par de savoureuses saillies.


Un bon réalisateur se repère à son sens du détail. La mise en scène de Sorrentino en fourmille, d'un concert de vaches improvisé à un morceau de viande dévoré par une chanteuse après son concert en passant par un papier que l'on froisse et qui provoque des réactions en chaîne. Le cinéaste aime les ruptures et les ellipses et son inimitable faculté à varier les musiques en est la parfaite illustration, le classique le disputant à la house dans un étonnante homogénéité. Mais l'opération est à double tranchant et l'accumulation de scènes, aussi réussies soit-elles, finit par desservir le film.

Paul Dano grimé en Hitler ou la Miss Univers nue au bord de la piscine étaient-ils indispensables ? On peut en douter, comme le traitement réservé aux personnages féminins, assez sommaire voire suspect, mis à part l'intervention tonitruante et jouissive de Jane Fonda. Reste l'ironique placidité du grand Michael Caine, du haut de ses quatre-vingt deux ans, impérial en vieil homme dont les souvenirs s'estompent. Il est la pièce maitresse et l'une des principales raisons d'aller voir Youth dont la fin s'avèrera, malheureusement, moins probante que celle imaginée par le personnage d'Harvey Keitel.

Antoine Jullien

Italie / France / Suisse / Grande-Bretagne - 1h58
Réalisation et Scénario : Paolo Sorrentino 
Avec : Michael Caine (Fred Ballinger), Harvey Keitel (Mick Boyle), Rachel Weisz (Lena Ballinger), Paul Dano (Jimmy Tree), Jane Fonda (Brenda Morel).



Disponible en DVD et Blu-Ray chez Pathé Vidéo.

mercredi 16 septembre 2015

Marguerite


"Il y a deux conduites avec la vie : soit on la rêve soit on l'accomplit". Marguerite, l'improbable héroïne du dernier film de Xavier Giannoli, épouse merveilleusement cet adage. En s'inspirant de la vie de Florence Foster Jenkins, riche américaine du début du XXème siècle persuadée d'être une cantatrice d'exception alors qu'elle était une épouvantable soprano, le cinéaste met de nouveau à l'honneur les personnalités qui ne sont pas dans la note, à l'instar du chanteur de bal de Quand j'étais chanteur. Et signe résolument son meilleur film. 

Dans le Paris des années 20, Marguerite Dumont est une femme fortunée passionnée de musique et d'opéra. Elle s'époumone régulièrement devant son cercle d'habitués qui n'ose pas lui dire qu'elle chante en réalité affreusement faux. Son mari tente d'entretenir l'illusion mais les velléités de son épouse et son envie de se produire à l'Opéra de Paris, face à un vrai public, vont durement compliquer sa tache. 

Catherine Frot

Xavier Giannoli recrée d'abord une époque nourrie d'apparences et de faux semblants. La beauté glacée de la photographie, aux teintes presque désaturées, évoque une société hypocrite et corsetée qui, par amusement et par intérêt, aime assister aux calamiteux récitals de Marguerite, sous l'oeil effaré de son mari qui n'ose pas se montrer dans ces pénibles instants. Le spectateur est d'ailleurs pris entre deux eaux, ne pouvant s'empêcher de rire face aux grotesques dissonances de la diva mais en même temps embarrassé devant l'humiliation qu'on lui fait subir, bien qu'elle soit inconsciente de la situation car délaissée dans le mensonge. Giannoli scrute sans complaisance une cruauté de salon, feutrée mais néanmoins dévastatrice.

Catherine Frot et Michel Fau

Seule Marguerite, à la fois naïve et passionnée, flotte au-dessus des railleries. Elle a une force, celle d'être doublement amoureuse, de la musique et de son mari. La grandeur de son amour pour l'opéra va la conduire à retrouver celui de son mari qui ne la regardait plus. Le film devient alors bouleversant car le cinéaste filme le portrait d'une irréductible et d'une exaltée, protégée par un époux qui est persuadé que si la vérité venait à éclater, elle en mourrait. A l'image de la bande originale qui alterne les grands airs d'opéra à la magistrale réorchestration du King Arthur par Michael Nyman, le comique le dispute au tragique dans une mise en scène savamment orchestrée par son entourage, attachée à cette femme au-delà du raisonnable. 

Giannoli prouve une fois encore qu'il est un réalisateur avisé, accordant de l'importance au moindre personnage. Ainsi, du chauffeur et photographe (formidable Denis Mpunga), metteur en scène ambigu sublimant la vie de Marguerite, à son professeur de chant (Michel Fau), irrésistible incarnation de l'excentricité des saltimbanques, en passant par son mari (touchant André Marcon), tous entourent magnifiquement Catherine Frot. Après plusieurs années d'absence, la comédienne trouve un rôle majeur, jouant à merveille l'aveuglement face au cynisme, avec une intensité qui émeut. Son regard dévasté lorsqu'elle découvre l'infidélité de son époux puis sa caresse sur son visage avec ses mots "Mon Mari" disent à quel point son interprétation est habitée. S'il n'y avait qu'un seul film français à voir en cette rentrée, il se nommerait Marguerite

Antoine Jullien

France / République Tchèque / Belgique - 2h07
Réalisation et Scénario : Xavier Giannoli
Avec : Catherine Frot (Marguerite Dumont), André Marcon (Georges Dumont), Michel Fau (Atos Pezzini/Divo), Christa Théret (Hazel). 

Disponible en DVD et Blu-Ray chez France Télévisions Distribution

mardi 8 septembre 2015

Le Tout Nouveau Testament


Après l'échec de Mr. Nobody, entreprise très ambitieuse mais plutôt ratée malgré certaines fulgurances, Jaco Van Dormael avait besoin de légèreté. Il part alors de l'idée que Dieu habite Bruxelles et se trouve être un sale type. Une comédie sur la religion, d'autres s'y sont essayé avec plus ou moins de bonheur dont les Monty Python et leur chef d’œuvre indépassable La Vie de Brian. Sans atteindre de tels sommets, Van Dormael retrouve la forme et réussit un conte drolatique et gentiment insolent.

Dans son morne appartement bruxellois, Dieu passe ses journées à imaginer les pires désagréments infligés à l'humanité. Il est odieux avec sa femme soumise (impayable Yolande Moreau) qu'il prend plaisir à martyriser. Sa fille décide de réagir en envoyant par SMS les dates de décès de tout le monde...

Benoît Poelvoorde, Yolande Moreau et Pili Groyne

La comédie francophone recèle d'ordinaire tellement peu de trouvailles que ce Tout Nouveau Testament ne peut que nous combler. Jaco Van Dormael ne recule devant aucune envolée créative et laisse libre court à son imaginaire. Son sens de l'absurde fait souvent mouche, renforcé par son flamboyant casting. Benoît Poelvoorde est un Dieu rêvé et l'acteur belge s'en donne à cœur joie, dans sa démesure coutumière. Il faut l'entendre évoquer son fils Jésus, à sa manière tout personnelle, pour admirer l’irrésistible malveillance du personnage. Décidément surprenant, Jaco Van Dormael convoque aussi la grande Catherine Deneuve, en ménage avec un gorille ! Et ça marche car la sincérité du cinéaste est telle que les idées les plus farfelues se transforment en instants tendres et désopilants.

Le réalisateur n'en n'oublie pas la poésie, déjà à l’œuvre dans son très beau Toto Le Héros. Ea, La fille de Dieu, part à la recherche de six apôtres afin d'écrire un tout nouveau testament. Un assassin, un obsédé, une femme délaissée, une manchote, un employé de bureau déprimé et un garçon qui veut devenir une fille vont, au contact d'Ea, regarder la vie autrement. Même si une certaine naïveté désamorce par endroits la folie du film qui est aussi desservie par une esthétique inégale, il apporte néanmoins un vrai vent de fraîcheur à un cinéma timide et sclérosé. Et a le mérite, sous le regard amusé du spectateur, de se moquer des croyances en n'insultant personne.

Antoine Jullien

Belgique - 1h54
Réalisation : Jaco Van Dormael - Scénario : Jaco Van Dormael et Thomas Gunzig
Avec : Benoît Poelvoorde (Dieu), Yolande Moreau (La femme de Dieu), Catherine Deneuve (Martine), François Damiens (François), Pili Groyne (Ea). 

Disponible en DVD et Blu-Ray chez Le Pacte.

jeudi 3 septembre 2015

Le Festival de Deauville 2015


Le 41ème Festival du Cinéma Américain de Deauville ne démarre pas sous les meilleures auspices. En effet, l'acteur Robert Pattinson, attendu sur les planches ce week-end pour la présentation du film Life dans lequel il interprète le photographe de James Dean, ne viendra pas dans la cité normande, retenu sur le tournage du nouveau long métrage de James Gray. Un sérieux accroc pour les organisateurs qui voient l'une de leurs rares vedettes s'envoler. 

Keanu Reeves, lui, sera de la partie pour un hommage à sa carrière. Il en profitera pour présenter Knock Knock d'Eli Roth dans lequel il se fait torturer par de magnifiques jeunes femmes mal intentionnées (voir la vidéo).

Keanu Reeves dans Knock Knock d'Eli Roth

Parmi les autres personnalités présentes, citons les acteurs britanniques Ian McKellen, immortalisé pour son rôle de Gandalf dans la saga du Seigneur des Anneaux, et son acolyte Legolas, alias Orlando Bloom, à qui un précoce hommage sera rendu (voir la vidéo), sans oublier l'artificier Michael Bay, auteur des chefs d'oeuvre Transformers et Armageddon. Heureusement, deux grands cinéastes seront eux à l'honneur, Orson Welles et Terrence Malick, qui seront absents. 

Le jury, présidé par le réalisateur Benoît Jacquot, devra départager une sélection de 14 longs métrages indépendants dont les remarqués Green Room, Dope et Krysha présentés au dernier Festival de Cannes

Everest de Baltasar Kormakur, le film d'ouverture

Après avoir ouvert la Mostra de Venise mercredi, Everest de Baltasar Kormarkur donnera le lancement des festivités deauvillaises vendredi et l'excellent Sicario de Denis Villeneuve clôturera la manifestation le 12 septembre. 

Mon Cinématographe couvre l'évènement, on en reparle très prochainement. 

41ème Festival du Cinéma Américain de Deauville du 4 au 13 septembre 
Renseignements : http://www.festival-deauville.com/

mercredi 2 septembre 2015

L'été meurtrier du cinéma français

Microbe et Gasoil, le plus gros échec de Michel Gondry

Par le passé, il est arrivé au cinéma français de connaître, au cœur de l'été, des divines surprises : La Dilettante en 1999, Harry un ami qui vous veut du bien en 2000 ou Le premier jour du reste de ta vie en 2008 ont su déjouer les pronostics, prouvant qu'un bon film d'auteur pouvait trouver sa place au milieu des blockbusters américains. Mais on ne pourra pas en dire autant cette année tant la succession d'échecs made in France laisse pantois. Des œuvres inégales, pour certaines réussies, mais qui n'ont pas attisé la curiosité du public. 

Des spectateurs qui n'ont jamais paru autant vouloir s'abriter dans une zone de confort. La preuve, le seul film français ayant attiré les foules est Les Profs 2 (plus de 3 millions d'entrées) qui, et ce n'est pas lui faire injure, ne brille pas particulièrement par ses qualités artistiques. On ne peut s'empêcher d'être vaguement consterné face à ce carton alors que d'autres films auraient mérité de tirer leur épingle du jeu. On pense à Michel Gondry qui a connu un échec cuisant avec son Microbe et Gasoil, ode à une jeunesse à la marge qui n'a intéressée personne (95 000 entrées*) ou Coup de chaud de Raphaël Jacoulot, brillante étude de caractères à l'atmosphère très chabrolienne qui est passée inaperçue (60 000 entrées). Quant à Love de Gaspar Noé, son imposante présence médiatique, à coup de polémiques et d'interdiction en salles aux mineurs, n'a pas suscité le désir, c'est un euphémisme (50 000 entrées).

50 000 entrées seulement pour Love de Gaspar Noé

Si ces films sortaient un peu du lot, une foule d'autres, eux, ne brillaient ni par leur originalité ni par leur audace. Et ils ont tous bu la tasse : Nos Futurs (170 000 entrées), Les Bêtises (65 000), Les Chaises Musicales (55 000). Des longs métrages honorables à défaut d'être renversants, noyés parmi la quinzaine de sorties hebdomadaire. Et les films d'auteurs grand public ne peuvent pas non plus se réjouir, à voir les scores médiocres enregistrés par Floride de Philippe Le Guay (300 000 entrées à ce jour), le réalisateur étant pourtant un habitué des bonnes places au box-office (Les Femmes du 6ème étage et Alceste à bicyclette), ou La Belle Saison de Catherine Corsini (175 000 entrées) qui avait signé en 2009 Partir, un beau succès sorti en plein mois d'août.

Seules consolations, le très bon accueil réservé à la production franco-turque Mustang qui a attiré plus de 400 000 spectateurs conquis, et la rêverie poético-bucolique de Bruno Podalydès, Comme un avion, bénéficiant d'une belle carrière estivale (430 000 entrées).

Le film de Joann Sfar, sorti un 5 août dans l'indifférence générale

Et lorsque l'on voit l'embouteillage des sorties tricolores qui se profile pour cette rentrée, on peut raisonnablement être inquiets. Car les distributeurs ont aussi une part de responsabilité dans ces échecs répétés, à voir comment Wild Bunch s'est débarrassé du film de Joann Sfar, La dame dans l'auto avec des lunettes et un fusil, inexplicablement à l'affiche un 5 août. Une stratégie suicidaire qui condamne les films d'emblée.

Il faudra donc faire l'évènement pour que les spectateurs, de moins en moins enclins à tenter l'aventure, ne se déplacent. On peut d'ores et déjà miser sur une comédienne, Catherine Frot, étincelante dans la peau d'une aristocrate férue d'opéra et chantant affreusement faux dans Marguerite de Xavier Giannoli, le film français de cette rentrée pour lequel il serait vraiment dommage de passer à côté. 

Antoine Jullien 

* Source JP's Box Office