mercredi 14 septembre 2011

Ressorties : Alice et Garbo


Invisible au cinéma depuis vingt-et-un ans, Alice de Jan Svankmajer ressort en copies neuves. Grand Prix du festival d'Annecy en 1989, le film est une relecture très personnelle d'Alice au pays des merveilles.

Alice, petite fille rêveuse d'une dizaine d'années, somnole dans sa chambre. Tout à coup, l'un de ses jouets, un lapin blanc, empaillé et enfermé dans une cage en verre, se met à frémir. Alice, incrédule, se frotte les yeux. Mais le lapin blanc semble vivant. Il s'enfuit, suivi par la petite fille qui, comme lui, pénètre dans le tiroir d'une table posée en plein champ. Que va découvrir Alice ? 

Le cinéaste tchèque Jan Svankmajer est aujourd'hui une référence dans le cinéma d'animation. Après avoir réalisé plusieurs courts métrages empreints de surréalisme, il se lance dans le tournage de l'oeuvre de Lewis Carroll grâce à l'aide de capitaux étrangers. Prenant le contre-pied des précédentes adaptations, le cinéaste présente l'aventure vécue par la jeune fille comme un rêve. Selon Svankmajer " Tandis qu'un conte présente une certaine morale, le rêve est une expression de notre inconscient, la tentative de réaliser nos plus intimes désirs sans les barrières de la rationalité ou des inibitions. Mon Alice est l'accomplissement d'un rêve." Un objet déroutant, sombre et étrange grâce à l'utilisation de marionnettes animées image par image qui ressemblent pour certaines à des cadavres ambulants. Très éloigné d'une féerie un peu mièvre, le film étonne aussi par ses nombreuses trouvailles visuelles, comme celle d'avoir transformé la petite fille en poupée lorsqu'elle se met à rapetisser. Plus adulte qu'enfantin, cette Alice  sensibilisera également les jeunes générations qui ne devraient pas rester indifférentes devant cet univers singulier. 



Sidney Lumet est mort il y a quelques mois et l'on regrette chaque jour davantage sa disparition tant la redécouverte de ses films nous conforte à l'idée qu'il était un grand cinéaste. A la recherche de Garbo, sorti en 1984, est une oeuvre méconnue du réalisateur d'Un après-midi de chien. Alors qu'elle apprend qu'elle souffre d'une tumeur au cerveau et que ses jours sont comptés, Estelle Rolfe (Anne Bancroft) n'a plus q'un voeu à exaucer : rencontrer Greta Garbo, son idole de toujours. Son fils se lance alors à sa recherche... 

La star éternelle de Ninotchka était encore vivante au moment du tournage. Inaccessible, le fils d'Estelle va pourtant tout tenter pour la retrouver, rencontrant ceux et celles qui l'ont connu ou épier. Du photographe fatigué de son métier à la vieille comédienne qui oublie ses répliques, Lumet leur apporte à chacun une tendresse sincère. L'humour et la légèreté sont omniprésents à travers l'interprétation pleine de panache d'Anne Bancroft, autant admirative de Garbo que révoltée face aux injustices. Une personnalité qui finira par déteindre sur son fils gagné peu à peu par une envie de fuir le conformisme. 

Ron Silver et Anne Bancroft

Puis vient La rencontre. Filmée en un seul plan qui se rapproche de manière imperceptible sur le visage d'Anne Bancroft, la scène est un modèle d'émotion et de pudeur. Estelle, au crépuscule de sa vie, se confie à Garbo, silencieuse, et à travers elle au spectateur. Un moment de grâce que le cinéaste clôt par une pirouette dont il a le secret. Un film destiné à tous les cinéphiles et amoureux de belles histoires.

Antoine Jullien

1 commentaire:

  1. Quand au Alice de Svankmajer, c'est un film à voir absolument d'après moi. Une œuvre très intéressante, avec une utilisation du son hors du commun et une vision personnelle du roman de Lewis Caroll pourtant déjà adapté et ré-adapté depuis des années (souvent pour le pire, quand on pense à Disney et/ou Tim Burton...)

    RépondreSupprimer