mercredi 24 décembre 2014

Les films à voir (ou pas) pendant les Fêtes

EXODUS / LA FAMILLE BELIER / LE TEMPS DES AVEUX / THE RIOT CLUB / 
COLD IN JULY / 20 000 JOURS SUR TERRE

Noël et son traditionnel lot de sorties de films. Outre Whiplash (voir Interview), il y en a pour tous les goûts et on vous aide à faire le tri !

EXODUS : GODS AND KINGS 


Après Gladiator, Kingdom of Heaven et Robin des Bois, voilà Sir Ridley Scott de retour aux commandes d'une superproduction épique. Le réalisateur met ses pas sur ceux de Cecil B. DeMille en racontant comment Moïse défia le pharaon Ramsès, entraînant 600 000 esclaves dans un périple pour fuir l'Egypte et ainsi échapper au terrible cycle des dix plaies, les dix châtiments que, selon le Livre de l'Exode, Dieu infligea à l'Egypte pour convaincre le pharaon de laisser partir le peuple d'Israël.

Ridley Scott conserve intact son sens du spectacle et ses visions d'apocalypse demeurent impressionnantes. Mais les qualités visuelles et plastiques indéniables de Exodus ne peuvent faire oublier les faiblesses d'un scénario qui ne s'intéresse nullement à l'affrontement entre Moïse et Ramsès, assez caricatural, préférant se focaliser sur les doutes du leader et son rapport avec Dieu, représenté ici sous les traits d'un enfant. Une bonne idée pas totalement exploitée de même que de nombreux personnages sont purement et simplement sacrifiés sur l'autel du montage. Et on ne peut justifier ceci par le fait que le cinéaste ait coupé près d'une heure du métrage. Donner aussi peu à jouer à des acteurs de la trempe de Ben Kingsley ou Sigourney Weaver est impardonnable, director's cut ou non. Et si Christian Bale est convaincant en Moïse, lui apportant suffisamment de substance et  de charisme, que dire du pauvre Joel Edgerton dans la peau de Ramsès, tristement égaré. On se dit alors que Les 10 Commandements se suffisait amplement à lui-même.

Etats-Unis / Grande-Bretagne / Espagne - 2h30
Réalisation : Ridley Scott  - Scénario : Adam Cooper, Bill Collage, Jeffrey Caine et Steven Zaillian
Avec : Christian Bale (Moïse), Joel Edgerton (Ramsès), John Turturro (Seti), Aaron Paul (Joshua), Ben Kingsley (Nun).

Sortie le 24 décembre 




LA FAMILLE BELIER 


C'est LE feel good movie français dont tout le monde parle, à qui l'on prédit un très grand succès populaire, l'histoire d'une famille de sourds-muets qui vit à la campagne et dont la fille aînée, Paula, la seule qui parle, sert d'interprète à ses parents pour la bonne gestion de leur ferme. Poussée par son professeur de musique qui lui a découvert un don pour le chant, elle décide de passer le concours de Radio France, sous le regard réprobateur de ses parents, mécontents de la voir partir. 

Bien qu'il sente un peu trop la formule gagnante, La famille Belier est un film sincère et sympathique, traitant le handicap avec suffisamment d'humour et de distance pour que la pilule passe agréablement. La réussite de cette comédie vient aussi du couple formé par Karin Viard et François Damiens qui insufflent à leurs personnages un doux mélange de loufoquerie et de sensibilité. Pour son premier rôle à l'écran, Louane Emera, lauréate du télé-crochet The Voice, s'en sort plutôt bien. Le réalisateur Eric Lartigau, à qui l'on doit la comédie romantique Prête-moi ta main, reste dans les clous d'un divertissement efficace et consensuel, sortant par moments des rails, notamment lorsque Karin Viard confesse qu'elle voulait que sa fille soit sourde de corps et d'esprit. On versera ou non sa petite larme à la fin dans une scène un peu trop attendue, et on portera un autre jugement sur les chansons de Michel Sardou. Et cela tient presque de l'exploit !

France - 1h45
Réalisation : Eric Lartigau - Scénario : Stanislas Carre de Malberg, Victoria Bedos, Thomas Bidegain, Eric Lartigau
Avec : Louane Emera (Paula), Karin Viard (Gigi), François Damiens (Rodolphe), Eric Elmosnino (Monsieur Thomasson).

En salles



LE TEMPS DES AVEUX 

 
Plus de vingt-ans après Indochine, Régis Wargnier plante à nouveau sa caméra dans cette région du monde, plus précisément au Cambodge pour filmer le destin de François Bizot, un ethnologue français capturé en 1971 par les  Khmers Rouges puis détenu dans un camp perdu dans la jungle et accusé par le régime d'être un espion de la CIA. Après plusieurs mois de détention, il finira par être libéré grâce à son bourreau, le terrible Douch. 

Régis Wargnier a le mérite de nous plonger dans une époque rarement dépeinte au cinéma, à l'exception notable de La Déchirure de Roland Joffé et des documentaires de Rithy Pahn qui a évoqué avec une force remarquable l'horreur des Khmers Rouges. Signalons d'ailleurs que le cinéaste est co-producteur du Temps des Aveux, une caution artistique et historique importante. Wargnier traite son sujet avec sobriété, montrant presque hors champ la barbarie d'un régime qui a causé plus d'un million de morts. Si la période de la captivité manque de tension, la partie suivante, qui se déroule à l'ambassade de France et qui voit les ressortissants français expulsés par les autorités Khmers, est plus prenante, décrivant comment les intentions du régime qui se met à vider les villes de ses habitants deviennent totalitaires. Le film évoque enfin la relation étrange entre Bizot et Douch, faite d'estime et de dégoût mélangés. Une œuvre imparfaite mais utile, un peu plombée par sa voix-off, et qui offre à Raphaël Personnaz un beau personnage d'homme éprouvé face à sa conscience.

France / Belgique / Cambodge - 1h35
Réalisation : Régis Wargnier - Scénario : Antoine Audouard et Régis Wargnier d'après l'oeuvre de François Bizot
Avec : Raphaël Personnaz (François Bizot), Kompheak Phoeung (Douch), Olivier Gourmet (Le Consul Marsac).

En salles 




THE RIOT CLUB 


La réalisatrice Lone Scherfig, remarquée avec Une Education, nous plonge dans les arcanes de la jeunesse dorée britannique dans The Riot Club, un cercle très secret d'Oxford réservé à l'élite de la nation. Deux étudiants fraîchement débarqués vont tout faire pour l'intégrer. 

Adapté de la pièce de Laura Wade, Posh, le film suit d'abord ces deux jeunes faire leurs premiers pas dans la prestigieuse université puis passer un concours de bizutage afin de devenir membres de ce fameux club. On assiste dans un premier temps à une description brillante des grandes institutions anglaises qui ne laissait en rien présager de ce qui nous attendait dans une seconde partie rageuse et violente. Le film devient une critique en règle d'une jeunesse qui se croit tout permis et au-dessus des lois, dans une sorte d'Orange Mécanique à l'envers. La réalisatrice a l'intelligence de ne pas simplifier ses protagonistes, leur donnant à chacun une personnalité qui va évoluer au cours du récit, et incarnés par une troupe d'acteurs talentueux (Sam Claflin, Max Irons, Douglas Booth...) Implacable, The Riot Club bouscule l'ordre établi et dénonce un establishment britannique sur de son pouvoir et de sa domination, s’achevant de manière cruelle et ironique sur l'air de God Save The Queen. Pas sûr que la Reine apprécie ce portrait peu amène de ses "tendres" rejetons.

Grande-Bretagne - 1h47
Réalisation : Lone Scherfig - Scénario : Laura Wade d'après sa pièce 
Avec : Sam Claflin (Alistair Ryle), Douglas Booth (Harry Villiers), Max Irons (Miles Richards), Natalie Dormer (Charlie).

Sortie le 31 décembre




COLD IN JULY 


Présenté à la Quinzaine des Réalisateurs du dernier Festival de Cannes, Cold in July est une relecture jouissive des polars eighties. L'action se déroule en 1989, au Texas où un homme abat un cambrioleur chez lui, en pleine nuit. Considéré comme un héros par la population locale, il va vite être rattrapé par le père de la victime, bien décidé à se venger. 

Le réalisateur Jim Mickle sait recréer cette époque grâce au brio de sa mise en scène et à la formidable musique synthétique de Jeff Grace qui permet au spectateur de s'immerger davantage dans cette intrigue à tiroirs qui multiplie savamment les rebondissements et qui ne va jamais là où on l'attend. Porté par des vraies "gueules" (Michael C. Hall, Sam Shepard et Don Johnson), Cold in July représente la quintessence de la série B, ne cherchant jamais à faire le malin et demeurant toujours scrupuleusement proche du genre auquel il appartient. Plus qu'un simple plaisir coupable, un vrai bon moment de cinéma.

Etats-Unis / France - 1h49
Réalisation : Jim Mickle - Scénario : Nick Damici et Jim Mickle d'après le livre de Joe R. Lansdale
Avec : Michael C. Hall (Richard Dane), Sam Shepard (Russel), Don Johnson (Jim Bob), Vinessa Shaw (Ann Dane).

Sortie le 31 décembre 




20 000 JOURS SUR TERRE 


Terminons ce panorama avec ce qui est sans doute le film le plus atypique de cette sélection. Tourné sur près d'une année, 20 000 jours sur Terre est un documentaire, à la lisière de la fiction, sur le célèbre chanteur australien Nick Cave. Durant une journée, on le suit dans sa ville de Brighton à travers une séance avec un psychanalyste, une visite dans ses Archives, lors de ses concerts et même dans sa voiture où il discute avec des personnalités ayant joué un rôle majeur dans sa vie.

Cette exploration de l’œuvre de Nick Cave et du mystère de la création nous permet de comprendre l'importance que l'artiste accorde à l'imaginaire et au souvenir et aussi à la difficulté d'écrire une chanson. Grâce à la voix off de Cave lui-même qui accompagne cette déambulation, on perçoit bien l'aspect littéraire de son travail, lui qui, outre ses qualités de chanteur et de compositeur, a rédigé plusieurs romans ainsi que des scénarii (The Proposition et Des Hommes sans loi de John Hillcoat). Révélant des anecdotes étonnantes sur les musiciens qu'il a côtoyé, notamment une savoureuse sur Nina Simone, Cave se met à nu, que ce soit en conversant dans sa voiture avec Kylie Minogue ou en parlant de son enfance avec Darian Leader, célèbre psychanalyste. Un cheminement intérieur qui nous fascine et qui nous en apprend davantage sur une personnalité paradoxale, à la fois calme et posé dans sa vie privé et déchainé et débordant de charisme pendant ses concerts. Un film singulier qui ne ressemble pas aux traditionnels documentaires sur des grandes figures musicales, même si on aurait souhaité que les deux réalisateurs, Iain Forsyth et Jane Pollard, aillent encore plus loin dans leur expérimentation.

Antoine Jullien

Grande-Bretagne - 1h37
Réalisation : Iain Forsyth et Jane Pollard - Scénario : Iain Forsyth, Jane Pollard et Nick Cave 
Avec : Nick Cave, Warren Ellis, Darian Leader, Ray Winstone, Kylie Minogue. 

Sortie le 24 décembre 


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