mercredi 25 mai 2011

The tree of life


Pour paraphraser le célèbre discours de Stanley Kubrick, on pourrait dire de The Tree of life que quiconque à eu le privilège de le voir sait que peu de choses dans la vie peuvent se comparer à ce que l'on ressent alors. Une expérience de cinéma à laquelle nous convie Terrence Malick, l'ermite le plus célèbre et secret du cinéma mondial, ne se montrant pas en public à cause d'une timidité supposée maladive et n'allant pas chercher la récompense suprême que le jury de Robert De Niro lui a décernée, la Palme d'or, le Graal que tous les cinéastes rêvent un jour de détenir entre leurs mains. Une absence médiatique exceptionnelle qui ne fait qu'amplifier l'excitation autour de l'oeuvre du cinéaste. Mais les délires les plus fous ont pris fin le jour de sa présentation cannoise. On peut enfin parler de The Tree of life

Dans le Texas des années 50, Jack grandit entre un père autoritaire et une mère aimante et généreuse. La naissance de ses deux frères l'oblige bientôt à partager cet amour inconditionnel, puis à affronter l'individualisme forcené d'un père obsédé par la réussite de ses enfants. Jusqu'au jour où un évènement dramatique vient perturber cet équilibre fragile. 


Ce synopsis ne rend pas compte des images que Terrence Malick nous projette. Car le film ne raconte pas seulement un drame familial et les réminiscences de Jack adulte sur son enfance, il nous parle également de la création de l'univers et de la confrontation de l'homme face à son milieu naturel. L'homme et la nature est un thème récurrent dans l'oeuvre de Terrence Malick et le cinéaste a toujours filmé des êtres que l'environnement fragilise ou élève. La dimension mystique est présente, plus que jamais, dans "l'arbre de vie" où l'ambition du cinéaste semble avoir atteint des proportions inédites. Mais si ses admirateurs attachaient une grande importance à son discours, les autres estimaient parfois qu'il débordait de poésie new-age pompière et naïve qui écrasait ses films (à l'exception des Moissons du ciel, son chef d'oeuvre). Là encore, Malick convie Dieu à chaque séquence et cette religiosité un peu envahissante pourra en irriter plus d'un. Mais comme tous les grands films qui nous échappent, l'important est ailleurs. 

L'image, ce mot n'aura jamais atteint un tel degré d'incarnation qu'à la vision de The tree of life. La première partie du long métrage, qui montre à la fois des moments de la vie de Jack enfant et de lui aujourd'hui se remémorant ces instants, est d'une puissance cinématographique inégalée. Dès le premier plan, un frisson ininterrompu vous parcourt et le cinéma devient alors sensoriel, organique et vous amène vers des sensations que nul autre film ne peut vous procurer. Un extraordinaire travail de la caméra permet à Malick de faire ressentir au spectateur les vibrations du corps et de l'âme, ces instants de flottement dans lesquels tous les repères semblent flous. Soudain, cette splendeur visuelle vous arrache des larmes sans que vous n'arriviez à comprendre pourquoi. Le cinéma, ce mot parfois trop galvaudé, retrouve une dimension que seuls quelques immenses créateurs arrivent à porter vers des territoires inconnus. Terrence Malick est de ceux-là. 


Mais le film dure 2h18 et ne tient cependant pas toutes les promesses que cette première partie pouvait laisser augurer. Si le cinéaste fascine encore avec ses images de big-bang, de volcans et d'océans, il déroule par la suite un récit plus linéaire où le drame familial prend toute la place. L'intrigue, jusqu'à alors nécessairement chaotique, devient presque fade, s'attachant à montrer la relation conflictuelle entre un père et ses enfants. Et la fin libératrice sur une plage où les morts côtoient les vivants pourra raviver chez les esprits moqueurs des critiques acides que l'on peut difficilement contester. De même que ces dinosaures, tout droit sortis de Jurassic Park, faisant plus de mal que de bien au récit. 

Alors, que retenir ? Un film inégal, incontestablement, et si Terrence Malick a épuisé cinq monteurs pour parvenir à ce résultat, c'est bien la preuve qu'il devait se nourrir de ces imperfections. Mais il ne peut pas mériter de jugement à l'emporte-pièce car il s'agit véritablement d'une oeuvre de création. Balourde et confuse, peut-être. Mais qui hante longtemps, au point de vouloir le revoir instantanément, rien que pour ces plans de la naissance d'un enfant, d'une grâce, osons le dire, divine. 

Antoine Jullien



DVD et Blu-Ray disponibles chez Europa.

4 commentaires:

  1. Haha, une chose est sûre, on est jamais d'accord sur les palmes d'or...

    J'ai eu énormément de mal à supporter les séquences "Home" qui n'ont d'intérêt que leur beauté. Qui elle n'a d'égal que le mal qu'elle fait au film. Surenchère tant dans la musique que dans les caméras un peu trop mobiles qui font du début du film un joli clip, bien qu'envahissant et vite pesant. Pour moi l'intérêt est réellement dans le déroulement du film, les séquences plus "réalistes" se présentant dans une recherche concrète et moins gratuite, avec une très belle photographie et un bon jeu d'acteur. Il aurait peut être fallu un monteur de plus pour couper les séquences de contemplation "du monde, de l'univers, et du reste" ... Mais un film ne se regarde pas par petits bouts et s'appréhende comme un tout.

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  2. OUI, on peut tout dire une fois on a vu le film mais effectivement c'est une oeuvre créative de 1er plan. Excellent et frustrant. C'est ce qui fait son charme. Alors chapeau bas Monsieur Malick.

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  3. Difficile. A voir vraiment motivé

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  4. Beautiful,a visual poetry!

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