David Bowie et Nagisa Oshima sont tous les deux célébrés, le premier à la Cité de la Musique dans le cadre d'une grande exposition qui lui est consacrée, le second à la Cinémathèque française pour une rétrospective intégrale de son œuvre. Deux grands artistes qui ont uni leur talent pour Furyo qui ressort cette semaine en version numérique 2K, plus de trente ans après sa sortie.
En 1942, dans l'île de Java, des soldats occidentaux sont emprisonnés dans un camp de l'armée japonaise dirigé d'une main de fer par le capitaine Yonoï (Ryuchi Sakamato). Parmi eux, Jake Celliers (David Bowie), un soldat anglais charismatique, trouble l'autorité et les émotions du capitaine. L'étrange relation entre les deux hommes et les discussions éclairées entre le colonel Lawrence et l'extravagant sergent Hara (le premier grand rôle de Takeshi Kitano) figurent une même inspiration : la compréhension et l'entente entre deux cultures que tout oppose.
David Bowie
Nagisa Oshima présente Furyo au Festival de Cannes en 1983. Auréolé du parfum de scandale qu'a suscité L'Empire des Sens, il se lance pour la première fois dans une grande production internationale à l'ambition commerciale assumée. Le cinéaste a l'ingénieuse idée de confronter à l'écran deux pop stars mondiales, d'un côté le chanteur britannique David Bowie, de l'autre le musicien nippon Ryuchi Sakamato qui signera l'inoubliable bande originale du film. Après quelques apparitions au cinéma, Bowie trouve ici son plus grand rôle, éclatant de magnétisme et de mystère dans la peau de ce soldat rebelle qui va doucement dérégler l'ordre établi qui régnait jusqu’à alors dans le campement.
Au-delà du discours homosexuel implicite auquel on a voulu le réduire, Merry Christmas, Mr Lawrence (le titre original, plus éloquent) est une grande œuvre humaniste malgré la violence âpre qui contamine les personnages engourdis par la torpeur de l'île. Le film nous subjugue à plus d'une reprise, comme lors de cette scène où David Bowie est enterré jusqu'au cou, dans la nuit, un papillon blanc sur le front. Un moment de grâce, poétique et tragique dans lequel Celliers attend sa mort prochaine. A Nagisa Oshima, disparu en 2013, de conclure cette œuvre visionnaire : " Les personnages de ce film (...) se séparent au moment même où ils ont accédé à une compréhension mutuelle ; nous autres, nous eûmes la chance de créer quelque chose grâce à notre compréhension mutuelle, et cette expérience se conclut sur la promesse de nous retrouver dans l'avenir."
Antoine Jullien
1983 - Japon / Grande-Bretagne / Nouvelle Zélande - 2h02
Réalisation : Nagisa Oshima - Scénario : Nagisa Oshima et Paul Mayersberg d'après le roman de Sir Laurens Van Der Post
Avec : David Bowie (Celliers), Tom Conti (Lawrence), Ryuichi Sakamoto (Yonoï), Takeshi Kitano (Hara).
Exposition David Bowie Is à la Cité de le Musique jusqu'au 31 mai.
Rétrospective Nagisa Oshima à la Cinémathèque française jusqu'au 2 mai.
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