La générosité peut se retourner contre vous. Telle est la morale de La bella gente, le deuxième long métrage de l'italien Ivano de Matteo, inédit dans son pays. Un couple d'intellectuels romains, Susanna et Alfredo, vient passer les vacances dans leur maison de campagne. Un jour, Susanna voit une jeune prostituée se faire maltraiter par un homme au bord de la route. Choquée, elle convainc son mari de la recueillir chez eux. Mais l'apparition de la jeune fille va bouleverser la vie familiale au point de malmener les grands idéaux de Susanna.
Sur le même thème, l'étranger que l'on accepte avant qu'il ne devienne une menace, Anne Le Ny en avait fait une comédie acide et cruelle dans Les Invités de mon père. Ivano de Matteo a opté pour un traitement plus dramatique de l'affaire. Sous la chaleur écrasante de ce petit village du sud de l'Italie, il filme une famille de bobos quinquagénaires en apparence harmonieux et paisible, s'aimant "comme il y a trente ans". L'impulsivité de Susanna, son désir soudain de sauver la jeune prostituée partaient certainement d'une bonne intention. Mais le cinéaste la fait subtilement dériver à mesure que les problèmes engendrés par la présence de cette jeune fille s'accumulent. Car la prostituée a le malheur de sortir de son cadre strict de victime silencieuse en s'émancipant avec le fils de la famille incarné par Elio Germano (prix d'interprétation à Cannes pour La Nostra Vita). L'hypocrisie de cette bourgeoisie aux valeurs morales irréprochables éclate au grand jour. La stabilité familiale vacille, les certitudes s'effondrent et la nature humaine reprend ses droits. Ivano de Matteao montre très justement ce basculement prévisible mais néanmoins intéressant à observer. Car la jeune fille devient le jouet de tous ces "gens biens", victime de la jalousie, de la veulerie et de la lâcheté humaine.
Le trait est parfois appuyé sur les personnages secondaires un peu stéréotypés (le couple d'amis inculte et vulgaire, la belle fille jalouse, le fils immature) mais la tension monte crescendo jusqu'au final attendu et inéluctable. On pourra reprocher au cinéaste de prendre ouvertement parti pour la victime et ainsi condamner sommairement le couple, en premier lieu Susanna. Mais la modestie de la mise en scène qu'on aurait imaginée plus incisive sert en réalité le propos et accompagne doucement cette fausse bienveillance qui cache des dessous moins nobles, où les gestes les plus anodins ont des répercussions dramatiques. Bénéficiant d'une interprétation remarquable (notamment Monica Guerritore), La bella gente, malgré ses quelques défauts (on ne sait rien de cette jeune fille), mérite qu'on se glisse subrepticement au coeur d'un malaise de plus en plus prégnant.
Antoine Jullien
Antoine Jullien
j'ai apprécié le film.le jeu des acteurs est subtil, simplement on a l’impression que le metteur en scène s'est focalisé plus sur les membres de la famille et a oublié un peu le personnage principal.Finalement la fille n'a rien fait de mal autrement dit elle n'a pas abusé de la gratitude de suzana.Elle est simplement tombé amoureuse de julio.
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