Au cinéma, tout est affaire de décor. Le réalisateur Raphaël Jacoulot a situé son intrigue au coeur des Pyrénées, à la frontière avec l'Andorre. Ce lieu d'un blanc immaculé, fouetté par la neige et le vent, est une belle métaphore des soubresauts que subissent les protagonistes d'Avant l'aube. Soit Jacques, un directeur d'hôtel prenant sous son aile Frédéric, un jeune en réinsertion qui va devenir son coursier. Une relation de confiance qu'un très lourd secret pourrait faire vaciller...
Une histoire de famille, de mensonge, de veulerie... Tout cela réunit dans un scénario remarquablement ciselé par le réalisateur et sa co-scénariste Lise Macheboeuf qui ont su développer deux personnages intéressants sur le papier prenant une réelle épaisseur humaine grâce à leurs interprètes. Vincent Rottiers, étoile montante du cinéma français, révélé dans Je suis heureux que ma mère soit vivante et Qu'un seul tienne et les autres suivront, marque une nouvelle fois de sa présence animale où la colère se dispute à l'envie. Car ce jeune homme va peu à peu goûter au luxe de l'établissement, attiré par l'aisance de Jacques et de sa famille. Une ascension sociale que Raphaël Jacoulot, par petites touches, rendra illusoire.
Jean-Pierre Bacri et Vincent Rottiers
Jacques est un homme ambigu, se prenant soudain d'affection pour le jeune homme tout en le manipulant en douceur. Malgré sa relation conflictuelle avec son fils, il est prêt à tout pour garder les apparences même face une enquêtrice digne de Colombo, maladroite et constamment enrhumée (savoureuse Sylvie Testud). Elle va pourtant s'avérer une épuisante fouineuse et mettre les nerfs de Jacques à vif. Jean-Pierre Bacri apporte à son personnage un mélange de séduction et de lâcheté, sans cesse sur le fil entre la sincérité réelle et le calcul personnel.
Raphaël Jacoulot, dans la tradition française, se rapproche d'un Simenon avec cette étude de caractères mêlée à une intrigue policière. Sa mise en scène, précise, nous baigne dans une atmosphère où l'on se sent bien, comme les clients de cet hôtel de luxe heureux de lire leur journal à l'heure du petit déjeuner. Mais ce vernis cache l'hypocrisie du rapport de classes et la bombe à retardement sociale qui est prête à exploser. Les dernières images laissent le spectateur sur un goût amer, attristé que justice n'ait pas été rendue mais soulagé par la dernière réplique de Sylvie Testud lancée à Frédéric : "T'inquiètes pas, va !"
Antoine Jullien
Antoine Jullien
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tres bien rappelle chabrol simenon enfin de nuoveau un polar français sans une goutte de sang....
RépondreSupprimertout en finesse, ce film est une réussite ... Les acteurs excellents, la policière façon Columbo...ils sont tous englués dans leurs ambiguïtés et leur complexité qu'un élément extérieur va faire déraper.
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