mercredi 22 avril 2015

Good Kill


Le nouveau film d'Andrew Niccol rejoint la longue liste des longs métrages ayant vertement critiquer l'intervention américaine au Moyen-Orient, de Green Zone à Redacted en passant par Jarhead et Dans la vallée d'Elah. Le réalisateur de Lord of War, un pamphlet virulent et impitoyable sur l'attitude des États-Unis en Afrique, traite cette fois de l'usage abusif des drones censés tuer les Talibans. Au moment où triomphe le très patriotique American Sniper, il fallait oser s'attaquer à la toute puissante armée américaine et remettre ainsi en question l'héroïsme de ses soldats, dépeints ici comme des manipulateurs de joysticks, perdant peu à peu le sens des réalités d'un conflit qui les dépassent.

Le commandant Tommy Egan (Ethan Hawke) est un pilote de drone et combat les Talibans douze heures par jour depuis sa base de Las Vegas. Le soir, il retrouve ses enfants et sa femme (January Jones) avec laquelle il entretient des rapports conflictuels. De plus en plus fébrile, il finit par douter du bien fondé de sa mission et des ordres très discutables qu'on lui commande.

Zoë Kravitz, Bruce Greenwood et Ethan Hawke

La très bonne idée d'Andrew Niccol est d'avoir situé son récit à Las Vegas, le temple du jeu et de l'artifice alors que le personnage d'Ethan Hawke semble être lui-même devenu un adepte des jeux vidéos, à voir la façon dont il manie les commandes du drone, rivé à son écran de contrôle, prêt à lancer l'attaque à la moindre apparition d'un suspect. La facilité déconcertante avec laquelle il tue, tranquillement installé dans un baraquement au milieu du désert du Nevada, ne peut qu'interpeller. Le cinéaste dénonce très clairement la manière dont les Etats-Unis utilise leur guerre contre le terrorisme. Les images de victimes innocentes décimées par ces bombardements à distance, considérés par l'armée comme de simples dommages collatéraux, est filmiquement très efficace. On ne verra d'ailleurs jamais le drone dans son entier mais l'image qu'il renvoie. Le conflit devient presque virtuel, ne se reflétant qu'à travers la caméra de l'aéronef. Une guerre "propre" pour ainsi dire.

Mais Andrew Niccol ne fait par la suite que répéter son procédé de mise en scène et, à l'inverse de Lord Of War, cède aux clichés. La rédemption est nécessairement au bout du chemin et notre "héros" va bien évidemment s'opposer à ces méthodes devenues inacceptables. Le geste final qu'il croit devoir accomplir, douteux et assez répugnant, finit par se retourner contre les louables intentions du film. Good Kill n'est plus l’œuvre polémique qu'elle prétend être mais avalise en réalité maladroitement ce qu'elle était supposée dénoncer. Un coup d'épée dans l'eau en somme qui ne redore que très partiellement le blason d'un cinéaste jadis beaucoup plus inspiré et audacieux.

Antoine Jullien

Etats-Unis - 1h42
Réalisation et Scénario : Andrew Niccol
Avec : Ethan Hawke (Tom Egan), January Jones (Molly Egan), Bruce Greenwood (Jack Johns), Zoë Kravitz (Vera Suarez). 



Disponible en DVD chez TF1 Vidéo.

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