Le Festival de Cannes a débuté sa soixante-sixième édition de manière inattendue avec La Tête Haute d'Emmanuelle Bercot, présenté en ouverture Hors Compétition. Après le désastreux Grace de Monaco l'an passé, le festival devait réparer cet affront et la chose est faite, et bien.
La réalisatrice nous raconte le parcours très chaotique d'un jeune délinquant, victime d'une mère inconséquente campée par une Sara Forestier en mode zezette (on finit par s'y faire, rassurez-vous !). Autour de lui, un éducateur (Benoît Magimel) et une juge pour enfants (Catherine Deneuve) vont tâcher de le remettre dans le droit chemin.
Catherine Deneuve et Rod Paradot dans La Tête Haute
Emmanuelle Bercot a effectué un important travail documentaire afin que son film sonne le plus justement. Dès la première séquence, on est saisi par l'urgence d'une situation qui semble déjà désespérée, la réalisatrice filmant un garçon irrémédiablement entraîné dans un infernal cercle de violence. Elle n'en n'oublie pas pour autant la fiction dans une dernière partie moins convaincante et un peu plus démonstrative. Mais le film nous prend à la gorge grâce également aux interprètes : Catherine Deneuve, superbe d'autorité et de dignité, Benoît Magimel, sobre et discrètement rageur, et la révélation Rod Paradot dont c'est le premier rôle au cinéma.
Tom Hardy, le nouveau Mad Max de George Miller
L'évènement de ce début de festival est la présentation Hors Compétition de Mad Max : Fury Road de George Miller, le créateur visionnaire de ce personnage devenu mythique apparu pour la première fois sur les écrans en 1978 sous les traits de Mel Gibson. Le film était très attendu et il dépasse toutes les espérances. Démentiel, jouissif, renversant visuellement, ce reboot de Mad Max est un spectacle total. Et sous ses dehors de super film d'action rempli de testostérone se glisse un manifeste féministe incarné par Charlize Theron, la véritable héroïne du film. L'univers déviant de l'oeuvre originale, fait de tôle, de pétrole et d'acier, situé au coeur du désert namibien transformé en monde post-apocalyptique, est tout simplement dantesque. Incontournable !
Salma Hayek dans Tale of Tales de Matteo Garrone
Les premiers films de la compétition présentés ne sont en revanche pas très emballants, à commencer par Tale Of Tales de Matteo Garrone. Après Gomorra et Reality, le cinéaste italien s'est intéressé à plusieurs contes de l'auteur Gian Batista Basile. Il en a retenu trois histoires se déroulant au XVIIème siècle où se côtoient fées, monstres et sorcières dans un film qui, malgré de beaux éclats, ne trouve jamais sa note et tombe par moments dans une bien fâcheuse ringardise. Et à l'exception de Toby Jones, caustique en improbable roi s'attachant à une puce géante, les autres comédiens (Vincent Cassel, Salma Hayek) en sont réduits à jouer des archétypes. Si Garrone a le mérite de changer de registre à chaque film, son inspiration, elle, décroit dangereusement.
Notre Petite Soeur de Hirokazu Kore-Eda
Le japonais Hirokazu Kore-Eda n'a pas non plus livrer une oeuvre majeure avec Notre Petite Soeur. Très inférieur à son précédent film, le très beau Tel Père Tel Fils, le cinéaste met plus de deux heures pour nous raconter une énième chronique familiale qui voit trois soeurs recueillir leur cadette. On peut qualifier le film de "joli" et ce n'est pas un compliment tant il semble dépourvu du moindre enjeu dramatique. Les bons sentiments ne font pas toujours de bons films et cette Petite Soeur, mièvre par moments, lénifiante le plus souvent, n'a guère fait palpiter notre enthousiasme.
Antoine Jullien
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