Deux épisodes méconnus de la Seconde Guerre mondiale viennent d'être portés à l'écran, nous rappelant l'indispensable implication d'hommes et de femmes qui ont contribué à vaincre la barbarie.
En adaptant la pièce de théâtre de Cyril Gely, le réalisateur Volkor Schlöndorff trouve un nouveau souffle inespéré. Le temps du Tambour (Palme d'or 1979) est bien lointain et le cinéaste n'avait plus vraiment marqué les esprits. Il profite d'un matériau de premier choix qui relate la rencontre (fantasmée ?) entre le général allemand von Choltitz, Gouverneur de Paris, et Raoul Nordling, Consul de Suède, durant la nuit de 24 au 25 août 1944. L'objet du débat : empêcher les allemands de détruire Paris.
Malgré son issue évidente, Diplomatie est une captivante partie de ping-pong verbal entre deux hommes qui, au-delà de leurs différences, éprouvent une réelle estime l'un pour l'autre. Choltitz est dépeint comme un militaire intraitable prêt à sacrifier la capitale alors que Nordling représente tous les atouts du parfait diplomate, disposant d'une force de persuasion redoutable. Son entrée par une porte dérobée donne bien la tonalité de l'affrontement à venir où il usera de beaucoup d'habileté et de quelques dissimulations pour parvenir à ses fins.
Niels Arestrup et André Dussollier
L'essentiel de l'action est concentré dans une suite de l'hôtel Meurice qui devient, au fur et à mesure de cette étrange nuit, un camp retranché. Les alliés sont aux portes de Paris et von Choltitz sait bien que la destruction de la capitale ne rapporterait rien aux Allemands, acculés face à l'insurrection. Le film questionne finement plusieurs thèmes dont l'insubordination et la nécessaire désobéissance face aux ordres délirants et odieux d'Hitler. Si le film prend certaines libertés avec l'Histoire, il la réinvente de belle manière, rappelant quelques faits peu glorieux et pose surtout la terrible question du choix. "Que feriez-vous à ma place ? " demande von Choltitz à Nordling qui lui répond, désemparé : "Je ne sais pas."
La réussite de Diplomatie ne serait pas entière sans la présence de deux grands comédiens, Nils Arestrup et André Dussollier. Grâce à la finesse de leur interprétation, ils décuplent l'intensité du film et notre plaisir de spectateur à les voir s'affronter à fleurets mouchetés. On regrette seulement que ce duel passionnant n'ait pas duré davantage tant ce pan déterminant de l'Histoire méritait bien tous les développements. Mais pour cela, autant revoir Paris brûle-t-il ?
France / Allemagne : 1h24
Réalisation : Volker Schlöndorff - Scénario : Cyril Gely et Volker Schlöndorff d'après la pièce de Cyril Gely.
Avec : André Dussollier (Raoul Nordling), Niels Arestrup (Général von Choltitz), Robert Stadlober (Lieutenant Bressendorf).
George
Clooney détenait un sujet un or : la plus grande chasse au trésor du
XXème siècle menée par sept hommes, des conservateurs de musée,
peintres, sculpteurs, architectes, partis sauver les œuvres d'art volées
par les nazis et les restituer à leurs propriétaires. Inspiré d'une
histoire vraie, Monuments Men avait, sur le papier, de quoi séduire : un casting all stars,
un réalisateur confirmé, une période de l'Histoire captivante. A
l'arrivée, un immense gâchis et une désagréable impression de s'être
fait roulé dans la farine.
On
a de l'estime pour George Clooney acteur qui s'est parfois aventuré
dans des territoires inattendus et pour le cinéaste qui a souvent
interrogé la mauvaise conscience de son pays à travers des films
politiques dont le plus réussi était Good Nigth, and Good Luck. Alors que s'est-il passé ? Il a tenté de se justifier en voulant réaliser un divertissement dans la lignée de La grande évasion et Les Canons de Navarone.
Autant on peut éprouver un certain plaisir à revoir ces films, autant
il est parfaitement anachronique de les refaire aujourd'hui. La
référence est tellement appuyée qu'elle en devient presque embarrassante
: musique abominable (composée pourtant par Alexandre Desplat, qui
signe la pire partition de sa carrière), blagues lourdingues,
réalisation d'un autre âge (Clooney ne semble connaître que le champ
contre champ).
John Goodman, Matt Damon, George Clooney, Bob Balaban et Bill Murray
Là où ces films avaient un scénario solide et de vrais personnages, Monuments Men en est malheureusement dépourvu, enchaînant poussivement les péripéties
avec une cruelle absence de rythme, et sacrifiant ses protagonistes qui
n'existent pas, réussissant au passage le prodige de rendre des acteurs
comme Bill Murray ou John Goodman totalement transparents. Seule Cate
Blanchett semble davantage convaincue par l'entreprise mais son rôle
reste secondaire.
En
revanche, le film devient plus gênant dans sa douteuse glorification
patriotique. Comment Clooney, qui a été le poil-à-gratter de l'Amérique,
a pu se vautrer dans un tel manichéisme ? Le réalisateur accumule les
clichés à la truelle, des bons américains propres sur eux prêts à sauver
le monde aux méchants nazis qu'on dirait tout droit de La Grande Vadrouille (l'acteur
qui joue Göring obtenant la palme du ridicule !), en passant par une
morale à deux sous assénée lourdement par la voix du réalisateur
lui-même, au cas où l'on aurait pas bien compris le message. Le cinéaste
en rajoute en supprimant les deux membres "étrangers" du groupe
dont le malheureux Dujardin qui devrait résolument arrêter ses
panouilles hollywoodiennes. En définitive, Clooney semble ne faire
confiance ni à son sujet qu'il escamote dans ses grandes largeurs, ni à
ses acteurs, encore moins à sa mise en scène et finit, faute
d'implication véritable, par échouer sur toute la ligne. Un ratage...
monumental.
Antoine Jullien
Etats-Unis / Allemagne - 1h58
Réalisation : George Clooney - Scénario : Grant Heslov et George Clooney d'après le livre de Robert M. Edsel et Bret Witter
Avec : George Clooney (Frank Stokes), Matt Damon (James Granger), Bill Murray (Richard Campbell), John Goodman (Walter Garfield).
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