jeudi 31 mars 2016

Un monstre à mille têtes


Dans La Zona, son premier long métrage, Rodrigo Plá démontrait un sens aigu de l'observation des inégalités sociales de son pays, le Mexique, sous les contours d'un thriller efficace. Un monstre à mille têtes, présenté à la dernière Mostra de Venise, poursuit dans la même veine engagée avec une remarquable sécheresse d’exécution. 

Dans une tentative désespérée d'obtenir le traitement qui pourrait sauver la vie de son mari, Sonia Bonet part en lutte contre sa compagnie d'assurance aussi négligente que corrompue. Elle et son fils se retrouvent alors pris dans une vertigineuse spirale de violence.

Jana Raluy 

Durant tout le film, on entend en voix off les minutes du procès qui ont suivi l'arrestation de Sonia. Une idée judicieuse car elle permet au spectateur d'avoir un contrepoint à l'action qui est en train de se jouer sur l'écran. Une forme de fatalisme se dégage aussi de ce processus narratif car l'issue est connue dès le départ. Rodrigo Plá l'utilise enfin pour diversifier les points de vue et ne pas simplifier un état de fait qui est déjà révoltant en soi. 

Car le cinéaste pointe du doigt les grandes entreprises et leur corruption endémique qui empêchent une femme de faire soigner son mari décemment. Face à ce système exempt de toute morale, elle va utiliser les seules armes qui lui restent. La tension générée par la mise en scène, dès la séquence où le médecin se dérobe et refuse de l'entendre, ne faiblira pas. Mais la concision de l'ensemble (1h14) qui est la principale qualité du film est aussi sa limite. On aurait aimé que le réalisateur développe davantage ses personnages et les situations dans lesquelles ils sont entraînés. On préférera retenir son propos utile et nécessaire sur les dérives d'une santé à deux vitesses devenue, selon le réalisateur lui-même, "l'ennemie du citoyen ordinaire."

Antoine Jullien

Mexique - 1h14
Réalisation : Rodrigo Plá - Scénario : Laura Santulo
Avec : Jana Raluy (Sonia Bonet), Sebastian Aguirre Boëda (Dario), Daniel Jimenez-Cacho (Nicolas Pietro).   


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire