mercredi 30 octobre 2013

Triste cinéma français


On ne va pas se lamenter une énième fois sur l'état du cinéma français mais deux films sortis cette semaine nous poussent à une mise au point. Non qu'il n'y ait pas de précieux talents dans l'hexagone (voir l'excellent 9 mois ferme de Dupontel) et de très bons cinéastes (Audiard, Ozon, Desplechin...) mais on sent notre cinéma constamment corseté entre la grosse comédie populaire devenue indigente et le film d'auteur nombriliste et prétentieux. 

A ce tire, Valéria Bruni-Tedeschi en est le digne représentant. Mystérieusement présent en compétition lors du dernier festival de Cannes, Un Château en Italie est la troisième auto-fiction de la réalisatrice qui nous parle (encore !) de ses malheurs de petite fille riche, convoquant sa mère et son ancien amant pour l'occasion. La gêne que nous procure ce film est la même que celle ressentie lors d'un dîner où l'on a pas été convié. Valéria Bruni-Tedeschi ne s'intéresse jamais au spectateur qui aurait, par malheur, envie de suivre son histoire familiale, se complaisant dans un narcissisme auto-satisfait très vite exaspérant. Sa personne est semble t-il la seule et unique chose qui l'intéresse et elle ne nous épargne rien de ses déboires sentimentaux et maternels dont on se lasse très rapidement. Alors entendre les termes "jubilatoire" et "irrésistible" à propos de cette oeuvrette révèlent soit d'un aveuglement caractérisé soit d'une malhonnêteté intellectuelle évidente. Non qu'on ne puisse lui trouver des qualités (je ne vois pas très bien lesquelles, cela dit...) mais prétendre qu'il s'agisse d'un film drôle alors que l'on sourit deux fois en 1h45 de projection est une duperie. A moins que cela ne soit un humour "intelligent" ? 

Ce film est significatif également dans sa pauvreté de mise en scène, exempte d'idées et d'inventions, et dans sa consternante fermeture au monde. Un cinéma rabougri, sans enjeux et interminablement long !  Le pire est sans doute atteint durant la dernière séquence dans laquelle Bruni-Tedeschi se prend soudain un peu (trop?) pour Visconti. Sans parler du dernier plan, grotesque, figé sur Louis Garrel (qui articule un peu plus, il faut le reconnaître). Un film simplement inutile, illuminé toutefois par Marisa Borini (la mère de la réalisatrice) qui apporte un peu d'élégance à l'ensemble. Mais quelle purge ! 


Je n'ai pas vu Fonzy d'Isabelle Doval mais il est caractéristique d'une autre tendance du cinéma français : la paresse. Alors que la comédie hexagonale a atteint cette année des abimes de médiocrité, voir les nombreux crash au box office (Turf, La Grande Boucle, Des Gens qui s'embrassent, Les Invincibles...), elle n'a pas trouvé d'autre idée que de faire des remakes de films sortis il y a un an ! En effet, Fonzy est la copie conforme du tendre et drôlissime Starbuck du québécois Ken Scott qui avait obtenu un très beau succès en France. José Garcia reprend le rôle titre et l'histoire est exactement la même : un homme qui devient le père de 533 enfants. 

Je n'ai pas voulu le voir car l'on a affaire à une escroquerie pure et simple ! Autant de facilité, de fainéantise et de nonchalance ne méritent pas qu'on s'intéresse au film. En revanche, il personnifie très bien ce mal du cinéma français qui a mis la rigueur et le travail de côté, surtout lorsqu'il s'agit de comédie, le genre le plus difficile à entreprendre. Heureusement, Guillaume Gallienne, qui lui aussi raconte sa propre histoire dans le désopilant Les Garçons et Guillaume, à table ! (en salles le 20 novembre) devrait mettre tout le monde d'accord. Mais il est bien le seul ! 

Antoine Jullien 

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