mercredi 2 mars 2011

Jewish Connection / Les femmes du 6ème étage


Jesse Eisenberg est l'acteur qui monte. Nommé aux Oscars pour The Social Network, le jeune comédien campe un juif orthodoxe dont le destin semble tout tracé : reprendre la boutique de son père, devenir rabbin et se marier à la jeune fille qu'on lui a promise. Mais il refuse cette destinée imposée et se voit proposer le transport de pilules d'ecstasy aux Pays-Bas. Sensible à cet argent facile, il va très vite devenir la tête pensante d'un vaste réseau qui va écouler jusqu'à un million de pilules avant que leurs "mules" ne se fassent arrêter à l'aéroport. 

Jewish Connection est inspiré d'une histoire vraie qui a eu lieu à la fin des années 90. Pour son premier long métrage, le réalisateur Kevin Asch s'en est servi pour raconter un roman d'apprentissage. Le héros est tenaillé entre sa confession et la rigueur de la religion. Par naïveté, il va peu à peu se défaire de son emprisonnement familial et ainsi se confronter au monde de la drogue. Une émancipation amorale que le cinéaste filme avec sobriété sans copier outrageusement ses illustres modèles. On pense beaucoup à Scorsese, à James Gray également pour la description minutieuse de cette famille juive avec ses rites et ses dogmes. Si l'intrigue policière n'est pas suffisamment traitée et si la tension et l'engagement font défaut, la partie parentale est de loin la plus réussie. Même si l'on a du mal à imaginer que les trafiquants aient réussi à amadouer leurs "mules" aussi facilement, en leur faisant croire qu'il s'agissait de simples médicaments, Jewish Connection est un film d'atmosphère assez prenant et superbement photographié qui confirme les espoirs portés en Jesse Eisenberg. 




Les femmes du 6ème étage du Philippe Le Guay est un film charmant. Sans ironie aucune, voilà le meilleur qualificatif pour encourager les spectateurs à venir assister à la transformation de Fabrice Luchini, agent de change rigoureux et austère, en libertaire adepte des bonnes espagnoles. 

L'action se situe au début des années 60 dans une France gaulliste ronflante et sclérosée. Philippe Le Guay parle de ce qu'il connaît et certains détails ne trompent pas. L'importance de la cuisson de l'oeuf coq de Monsieur, l'emploi du temps "épuisant" de Madame, le cinéaste épingle gentillement une bourgeoisie figée dans ses traditions. La joliesse des décors et des costumes concourent à créer une atmosphère surannée que les espagnoles vont mettre sans dessus dessous. 

Le cinéaste a réalisé un conte lumineux en évitant le mieux possible les clichés et la caricature. Il évoque l'immigration, la place des femmes dans la société avec un positivisme qui gagne rapidement le coeur du spectateur. Il aurait pu tomber dans le folklore facile ou le misérabilisme mais la conviction des comédiennes ibériques empêchent le film de sombrer dans ces travers. De Carmen Maura, impériale, à Natalia Verbeke, nouvelle venue pleine de charme, elles apportent une douce folie qui fait contrepoids à la politesse empruntée de Fabrice Luchini. Le comédien, en retenue, donne sa petite musique à l'ensemble et le couple qu'il forme avec Sandrine Kiberlain donne quelques séquences bien senties. Mais au bout des terres espagnoles, le film se heurte aux cailloux du formatage consensuel. Pas une erreur d'aiguillage, pas un bouleversement ne viennent pertuber un scénario sans aucune surprise. C'est la qualité et le défaut du film, nous avoir offert un divertissement agréable et léger qui ne risque pas de laisser des traces indélébiles dans notre mémoire cinéphilique.

Antoine Jullien

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