La période estivale est propice aux ressorties. Deux films invisibles depuis longtemps ont la chance de retrouver les salles obscures. Sans oublier un classique du western dont on ne se lasse pas.
Du Silence et des Ombres de Robert Mulligan est un film culte aux USA mais relativement méconnu chez nous. Il est adapté du best-seller d'Harper Lee To Kill A Mockingbird, Prix Pulitzer en 1961, et valu à son interprète principal, Gregory Peck, l'Oscar du meilleur acteur. Dans une petite ville d'Alabama, au moment de la Grande Dépression, Atticus Finch, un avocat qui élève seul ses deux enfants, est commis d'office pour défendre un homme noir accusé de viol. L'histoire est racontée du point de vue des deux enfants qui vont être brutalement confrontés à la haine et à la violence des hommes. Protégés par un père dont ils ne supposaient pas l'intégrité, ils perdront une partie de leur innocence mais se forgeront une conscience humaniste à une époque où le racisme est à son paroxysme.
Robert Mulligan filme avec beaucoup de sensibilité cet éveil à l'âge adulte et l'on retrouvera cette même pudeur quelques années plus tard dans Un été 42. Le cinéaste montre, dans un noir et blanc vaporeux à la lisière du fantastique, les peurs enfantines et l'ombre menaçante d'un marginal reclus qui hante les habitants. Puis vient le temps du procès dans lequel Gregory Peck, impérial, fait preuve de tout son talent en clamant haut et fort sa soif de justice. Le film, tourné en 1962 au moment de l'avènement de Martin Luther King, aborde un sujet très sensible sans être moralisateur. Si un certain didactisme pointe par endroit, Mulligan sait être lucide en éveillant les consciences sur les dangers du repli sur soi et de la peur de l'autre. Des sujets qui n'ont malheureusement pas perdu de leur actualité.
Taking Off, réalisé en 1971, est le premier film américain de Milos Forman. Le cinéaste avait du quitter la Tchécoslovaquie après l'accueil désastreux qui lui avaient réservées les autorités sur Au Feu les Pompiers, virulente critique du système communiste. Aidé par son ami Claude Berri, il part au pays de l'oncle Sam tourner la révolution culturelle qui est en marche. Mais au lieu de s'intéresser aux enfants hippies, ils préfère raconter le parcours de leurs parents en totale perte de repères devant le comportement de leurs rejetons.
Le film a une approche très documentaire, avec un début où des jeunes pris sur le vif chantent dans une sorte de Star Ac avant l'heure. Jean-Claude Carrière, le co-scénariste du film, estimait qu'il n'était pas très pertinent de filmer les jeunes en train de fumer et proclamer la paix dans le monde mais plutôt de montrer la déconfiture sociologique et morale de leurs aînés. Un choix narratif audacieux qui permet de savourer des séquences caustiques et parfois burlesques, notamment lors d'un hilarant dîner entre parents qui vire au striptease intégral. Taking Off offre un instantané d'une époque où la liberté d'être et de penser était l'obsession de tous, Forman se montrant déjà un redoutable analyste de la société américaine qu'il décryptera magistralement dans ses oeuvres suivantes. Un film rare, très drôle, à consommer sans modération.
Comment ne pas terminer cette saison sans évoquer le retour de Sergio Leone avec le mythique Il était une fois dans l'Ouest. Tout a déjà été dit sur ce chef d'oeuvre indépassable qui réiventa à jamais le western. Musique géniale de Morricone, cadrages insensés, interprétation mémorable où trône Henry Fonda dans son seul rôle de salaud, revoir ou re-revoir le film sur grand écran est une vraie cure de jouvence. Comme un baptême du feu.
Antoine Jullien
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire