jeudi 7 avril 2016

L'art du mauvais remake

 
Réussir un remake n'est pas chose aisée. Certains ont reproduit leur propre film (Hitchcock avec L'Homme qui en savait trop, Haneke avec Funny Games), d'autres ont osé le remake plan par plan (Gus Van Sant et son indéfendable Psycho) mais la plupart s'y sont cassé les dents, commettant des plagiats inutiles ou ratés, du catastrophique Diabolique au médiocre Vanilla Sky. Cela devient plus piquant lorsque le réalisateur déclare lui-même ne pas aimer l’œuvre originale qu'il est en train de saborder. C'est le cas du cinéaste italien Luca Guadagnino, l'auteur de Amore, un mélo baroque et flamboyant incarné par la diaphane Tilda Swinton qui interprète cette fois une rock star aphone ! Une incongruité qui aurait du faire le sel de cette adaptation "libre" et "contemporaine" de La Piscine de Jacques Deray, renommé pour l'occasion A Bigger Splash. Un grand plouf en effet, grotesque et indigeste.

Une légende du rock et son compagnon se reposent en Italie sur l'île de Pantelleria, au bord d'une belle villa avec piscine. Quand son ancien amant, un producteur de musique, débarque avec sa fille, la situation se complique. Le passé qui ressurgit vont leur faire vivre des vacances très rock’n’roll. 

Matthias Schoenaerts, Tilda Swinton, Dakota Johnson et Ralph Fiennes

La Piscine est un film tendu et étouffant. Cette pâle copie est clinquante et superficielle. Le premier est un huis clos mis en scène au cordeau alors que Luca Guadagnino tente vainement d'aérer son récit par des flashbacks superflus. Le film de Deray bénéficiait d'un casting où explosait le magnétisme d'Alain Delon, la beauté incandescente de Romy Schneider, la virilité vénéneuse de Maurice Ronet et la fausse candeur de Jane Birkin. Là, on doit subir le cabotinage de Ralph Fiennes, la fadeur de Dakota Johnson et l'absence de charisme de Matthias Schoenerts. Seule Tilda Swinton surnage en essayant péniblement d'empêcher que l'entreprise ne prenne l'eau de toute part.

Et pourtant, Luca Guadagnino signe un film totalement décoratif, dépourvu de la moindre tension, qui surligne chaque effet. De plus, il s'est cru obligé de contextualiser son intrigue en évoquant la crise des migrants. Mais attention, les protagonistes ne s'en préoccupent que vaguement, occupés à déguster de la ricotta entre deux baignades ensoleillées. Une telle vacuité alliée à un final invraisemblable et pathétique finit de nous achever. A l'avenir, chers réalisateurs, ne touchez plus à des classiques si c'est pour les massacrer de la sorte ! L'histoire du cinéma ne vous le pardonnera pas. 

Antoine Jullien

Italie / France - 2h04
Réalisation : Luca Guadagnino - Scénario : David Kajganich et Alan Page
Avec : Tilda Swinton (Marianne Lane), Ralph Fiennes (Harry Hawkes), Matthias Schoenaerts (Paul de Smedt), Dakota Johnson (Penelope Lanier). 

Disponible en DVD chez Studio Canal.

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