Micmacs à tire-larigot. Jean-Pierre Jeunet aimé décidément les titres à rallonge tout comme les expressions d'un autre temps qu'il s'amuse à réemployer dans la bouche de ses comédiens, ici Omar Sy dans le rôle de Remington, l'un des chiffonniers ami et complice de Bazil (Dany Boon) qui, suite à une balle perdue reçue dans le crâne, est bien décidé à se venger de deux canailles marchands d'armes (André Dussollier et Nicolas Marié).
L'histoire n'est donc pas d'une grande originalité mais on était curieux de voir de quelle manière Jeunet aller aborder ce monde obscur et redoutable des "marchands de la mort". Et bien il le fait très "gentiment". Le réalisateur a sans cesse le cul entre deux chaises et tente de concocter une mixture entre Amélie Poulain pour sa fantaisie débridée et Délicatessen pour ses trognes et son inquiétante étrangeté. Le pari est perdu des deux côtés et pour faire référence au personnage de Yolande Moreau, la "tambouille" ne prend pas et manque cruellement de saveur.
Dany Boon et Jean-Pierre Marielle
Le cinéaste semble cette fois étranger à ce qu'il raconte, recyclant ses idées et s'autocitant plus que de raison (plusieurs affiches de Micmacs à tire-larigot apparaissent tout au long du film). Chacun fait bien son travail dans son coin mais sans jamais dégager l'osmose qui faisait tout le charme de ses précédents films. De la bonne ouvrage dont on voit les mécanismes et les rustines et dont on finit même par se lasser. La faute aussi à un scénario étonnamment faible, sans enjeu véritable, sans personnage réellement consistant.
Jeunet a fait ce film presque par accident, après avoir travaillé pendant des années sur l'adaptation de L'histoire de Pi pour le compte d'un studio hollywoodien. Le projet, trop lourd à financer, a été abandonné. Regrettable décision car le cinéaste se serait emparé d'un matériau tout à fait nouveau et aurait peut-être atteint une autre dimension. Là, il faut se contenter d'un plat réchauffé. Heureusement, ses qualités hors pair de conteur ne se sont pas envolées et au détour d'un plan, on retrouve le style Jeunet.
Il est donc inutile de taper, comme le font certains critiques aigres et vengeurs, sur un homme qui a bouleversé le paysage cinématographique français par ses trouvailles, son sens visuel imparable, ses gueules inoubliables, son imagerie rétro... Un coup de pompe peut arriver aux meilleurs mais si l'on doit attendre cinq ans entre chacun de ses films, la remise en forme s'avèrera indispensable !
Plus inattendu et beaucoup plus audacieux, voici Panique au Village de Vincent Patar et Stéphane Aubier. A l'origine, c'était une série télévisée de vingt épisodes diffusée sur Canal + en 2003. Les auteurs ont décidé d'en faire un long métrage, court (1h15), avec les voix d'origine (dont celle de Benoît Poelvoorde).
L'histoire importe peu, c'est le procédé qui surprend : une animation image par image de figurines pour enfants représentant, entre autre, un cheval, un cowboy et un indien... A l'inverse du formidable Mary et Max dont la forme était accessible mais le fond beaucoup plus adulte, Panique au village reste très enfantin mais peut désarçonner par son animation pas très fluide et des voix parfois à peine audibles.
Mais curieusement, ces défauts se transforment en qualités et une vivifiante énergie créatrice se dégage de cet ovni, et surtout un humour typiquement belge des plus réjouissants. On se laisse vite embarquer par cet improbable trio dont les aventures deviennent de plus en plus délirantes, au risque d'un j'm foutisme sympathique mais un peu "too much".
Même si l'ensemble s'essoufle un peu, force est de constater que nos amis belges ne sont pas seulement les maîtres de la bande dessinée. Ils marquent un grand coup en nous offrant un moment drôle et absurde, pour petits et grands.
Antoine Jullien
Antoine Jullien
Voilà un commentaire qui me fait bien plaisir! Pas seulement parce qu'il est sympatique, mais avant tout parce qu'il a le mérite de s'intéresser à un film très original en effet (et peut-être pas grand public a priori)!
RépondreSupprimerJ'ai eu le grand plaisir de découvrir Panique au village cet automne à Bruxelles en projection en plein air. Vraiment ça valait le déplacement! Et sur le terrain de basquet transformé en salle de cinéma, ce sont autant les enfants, leurs parents et les jeunes du quartier qui se tordaient de rire! Les voix très pittoresques des comédiens belges n'y sont pas pour rien bien sûr!
Christine