"Is it safe ?" Cette réplique glaçante prononcée par Laurence Olivier en a traumatisé plus d'un. Trente-quatre ans après sa sortie, Marathon Man exerce toujours la même fascination et nous rappelle l'étonnante faculté du cinéma américain des années 70 à mêler le thriller à la Grande Histoire.
Babe (Dustin Hoffman), un étudiant new-yorkais solitaire et introverti, s'entraîne pour le marathon. Il fait la rencontre d'une jeune universitaire dont il tombe amoureux. Mais leur idylle va devenir une longue descente aux enfers qui les verra croiser un frère aux mystérieux desseins, un tortionnaire nazi et une "Division" bien opaque...
John Schlesinger, auréolé par le succès de Macadam Boy, se voit proposer par le producteur Robert Evans l'adaptation du roman de William Goldman. Très vite, les deux comparses pensent à Dustin Hoffman et Laurence Olivier pour les rôles principaux. Evans dira au moment de la sortie que c'était la seule fois de toute sa carrière que la distribution rêvée devenait réalité. Et quelle distribution ! Outre Hoffman et Olivier, on retrouve Roy Scheider dans le rôle du frère, William Devane en agent de la Division et la jeune Marthe Keller qui connaissait déjà un beau succès en France.
Marathon Man rejoint la liste des grands thrillers paranoïaques des seventies : Conversation Secrète, Les Trois jours du Condor ou Les Hommes du Président. L'intrigue, déroutante, passe d'un personnage à un autre sans que l'on comprenne précisément les liens entre tous les protagonistes (le film n'est d'ailleurs pas exempt de certaines incohérences) jusqu'à ce que l'étau se resserre sur Babe et que l'on suive, au bout du suspense, son épuisante course contre la montre.
Laurence Olivier et Dustin Hoffmann
Plusieurs moments du film sont ancrés dans la mémoire collective : la scène du dentiste est la plus célèbre (elle dû même être édulcorée suite à divers évanouissements lors des projections-test). Mais la séquence la plus impressionnante est sans nul doute celle dans laquelle Laurence Olivier est reconnu par ses anciennes victimes alors qu'il tente de revendre ses diamants. L'inquiétante musique dissonante de Michael Small accompagne à la perfection cet instant d'anthologie où l'horreur côtoie le fantastique.
Le film est enfin l'affrontement de deux générations d'acteurs : Dustin Hoffman, rompu à la méthode de l'Actor's Studio et Laurence Olivier, héritier de la vieille école du théâtre anglais. Une anecdote fameuse marque bien cette différence : alors qu'Hoffman avait passé plusieurs nuits d'affilée sans dormir dans le but de retrouver l'état de fatigue du personnage, Laurence Olivier lui aurait lancé : "Et si vous vous contentiez de jouer ?" Il aurait à nouveau sorti cette saillie lorsque Hoffman entamait un épuisant jogging afin de parfaire la séquence à venir qui voyait son personnage se confronter au redoutable docteur Szell joué par Olivier. Mais à la vision des images du tournage, visibles dans les bonus du Dvd, on voit se dessiner entre ses deux immenses comédiens une admiration discrète et un profond respect. Ils ne savaient pas encore qu'ils venaient d'écrire une des plus belles pages du cinéma américain.
Antoine Jullien
DVD disponible chez Paramount Vidéo.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire